L’Avocat général Eleanor Sharpston a présenté, le 10 mars dernier, ses conclusions concernant la suppression par la Belgique, depuis le 1er janvier 2014, de l’exonération de la TVA pour les prestations de services des avocats (Ordre des barreaux francophones et germanophones, aff. C-543/14). A la suite de cette modification, plusieurs Barreaux belges, des associations humanitaires et de défense des droits de l’homme et des particuliers ont saisi la Cour constitutionnelle belge pour faire annuler la loi ayant introduit l’assujettissement à la TVA pour les prestations d’avocat, à l’exception de celles effectuées dans le cadre de l’aide juridictionnelle. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a, notamment, interrogé la Cour sur le point de savoir si le fait que les services que fournissent les avocats ne sont pas exonérés de la TVA et ne peuvent pas non plus être soumis à un taux réduit est compatible avec certains principes fondamentaux, tels que le droit à l’assistance d’un avocat et l’égalité des armes, inscrits, en particulier, dans la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. L’Avocat général estime que l’exercice du droit d’accès à la justice est inévitablement rendu plus difficile si le coût du recours à des services de conseil ou de représentation juridiques augmente en raison de la suppression d’une exonération fiscale. Néanmoins, elle ne considère pas qu’il y ait une incompatibilité entre l’assujettissement de principe des services d’avocats à la TVA et un quelconque aspect du droit fondamental d’accès à la justice. Il ne semble pas, selon elle, qu’une augmentation du coût des services d’avocats, même si elle devait s’élever à 21%, puisse être considérée comme portant atteinte à la substance même du droit d’accès à la justice. Ainsi, elle est d’avis que l’application de la TVA aux services que fournissent les avocats n’affecte pas le droit à l’aide juridictionnelle garanti à l’article 47 de la Charte. De plus, elle estime que, s’agissant de la possibilité pour certaines personnes de déduire la TVA, l’Etat n’est nullement tenu d’assurer une égalité des armes absolue. L’inégalité des armes est en réalité susceptible d’être conditionnée par d’autres facteurs, notamment des différences de « rapport qualité/prix » entre les avocats et des différences de ressources financières de chacune des parties. Partant, l’Avocat général invite la Cour à répondre que les services fournis par les avocats peuvent être soumis à la TVA. La Cour est libre de suivre ou de ne pas suivre la solution proposée par l’Avocat général. (SB)