Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Cour de cassation (France), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 27 avril dernier, l’article 14 §2, sous a), du règlement 1408/71/CEE relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et membres de leurs familles qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, et l’article 12 bis, point 1 bis, du règlement 574/72/CEE fixant les modalités d’application du règlement 1408/71/CEE, lesquels sont relatifs aux règles applicables aux personnes exerçant une activité salariée sur le territoire de 2 ou plusieurs Etats membres (A-Rosa / URSSAF, aff. C-620/15). Dans l’affaire au principal, une société allemande a employé en France des travailleurs saisonniers, ressortissants d’autres Etats membres, ayant des contrats de travail soumis au droit suisse, l’administration et les ressources de la société étant gérées par une succursale en Suisse. L’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (« URSSAF ») a relevé des irrégularités dans la couverture sociale des travailleurs. La société a fait l’objet d’un redressement au titre d’arriérés de cotisations sociales. Elle a présenté des certificats E 101 délivrés par la caisse d’assurance sociale suisse au titre du règlement 574/72/CEE imposant à l’institution désignée par l’Etat membre dont la législation est applicable, en application du règlement 1408/71/CEE, de délivrer un tel certificat attestant que le travailleur est bien soumis à la législation dudit Etat membre. L’URSSAF a demandé le retrait des certificats à la caisse suisse en relevant que ceux-ci n’auraient pas dû être établis sur le fondement du règlement 1408/71/CEE puisque l’activité en cause s’exerçait en permanence et exclusivement en France, de sorte que les travailleurs auraient dû être déclarés auprès des organismes de sécurité sociale français. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si un certificat E 101 délivré par l’institution désignée par l’autorité compétente d’un Etat membre, au titre du règlement 1408/71/CEE, lie tant les institutions de sécurité sociale de l’Etat membre dans lequel le travail est effectué que les juridictions de cet Etat membre, même lorsqu’elles constatent que les conditions de l’activité du travailleur concerné n’entrent manifestement pas dans le champ d’application de ce règlement. La Cour rappelle que le certificat E 101, créé une présomption de régularité de l’affiliation du travailleur au régime de sécurité sociale de l’Etat membre où est établie l’entreprise. Elle précise qu’aussi longtemps qu’il n’est pas retiré ou déclaré invalide, ce certificat s’impose dans l’ordre juridique de l’Etat membre dans lequel le salarié travaille et, partant, lie les institutions de cet Etat. Ainsi, la juridiction de l’Etat d’accueil ne peut pas vérifier la validité du certificat au regard des éléments sur la base desquels il a été délivré. La Cour relève que des procédures spécifiques doivent être suivies pour résoudre les différends entre les institutions des Etats membres portant sur la validité ou l’exactitude d’un certificat E 101 et elle constate que les autorités françaises compétentes n’ont pas suivi ces procédures. (MS)