Les sanctions pécuniaires imposées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (« CSA ») à une chaîne de télévision après la diffusion de séquences attentatoires à l’image des femmes et stigmatisant les personnes homosexuelles ne constituent pas une violation de la Convention (9 février)
Arrêt C8 (Canal 8) c. France, requêtes n°58951/18 et n°1308/19
Dans un 1er temps, la Cour EDH rappelle que les formes d’expression qui cultivent l’humour sont protégées par l’article 10 de la Convention. Dès lors, elle doit déterminer si les ingérences dans l’exercice du droit à la liberté d’expression étaient prévues par la loi, inspirées par un ou des buts légitimes et nécessaires dans une société démocratique pour les atteindre. A cet égard, la Cour EDH précise que la marge d’appréciation des Etats est élargie en l’absence de contribution ou de participation à un débat d’intérêt général. En l’espèce, les séquences télévisuelles en question n’étaient porteuses d’aucune information, opinion ou idée d’intérêt général et s’inscrivaient dans le cadre d’une émission de pur divertissement ayant pour but commercial d’attirer le plus large public possible. En outre, elle observe qu’elles ont été filmées dans une émission qui rencontre un écho particulier auprès du jeune public. Elle juge dès lors que les sanctions du CSA ont été prises sur la base de motifs pertinents et suffisants, à savoir des manquements multipliés aux obligations déontologiques de la chaîne malgré les mises en demeure, le caractère attentatoire à l’image des femmes, la nature stigmatisante et l’atteinte à la vie privée des personnes homosexuelles des séquences. Dans un 2nd temps, la Cour EDH admet la sévérité des sanctions imposées mais reconnait leur nature pécuniaire particulièrement adaptée aux comportements réprimés dont l’objet est purement commercial. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 10 de la Convention. (MC)