Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Cour d’Appeal de Paris (France), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 7 juillet dernier, l’article 101 §1 TFUE prohibant les accords et décisions entre entreprises (Genentech Inc. / Commission, aff. C-567/14). En l’espèce, après qu’une société allemande ait concédé à une société active dans le secteur pharmaceutique une licence non exclusive mondiale pour l’utilisation d’un activateur breveté pour un usage thérapeutique ou dans le cadre d’une procédure de diagnostic, cette dernière a utilisé cet activateur pour faciliter la transcription d’une séquence d’ADN nécessaire à la production d’un médicament, sans enfreindre les brevets sous licence et, par conséquent, sans verser la redevance courante prévue par l’accord de licence. Au terme d’une procédure arbitrale et d’une action en contrefaçon lancées à l’encontre de la société pharmaceutique, la responsabilité de cette dernière a été retenue pour manquement de paiement de la redevance courante. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 101 §1 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que, au titre d’un accord de licence tel que celui en cause au principal, il soit imposé au licencié de payer une redevance pour l’utilisation d’une technologie brevetée pendant toute la période d’effectivité de cet accord en cas d’annulation ou de non-contrefaçon des brevets protégeant cette technologie. La Cour rappelle, tout d’abord, que dans le cadre d’une procédure préjudicielle, il ne lui appartient pas de revoir les faits constatés par l’arbitre unique, ni l’interprétation de l’accord de licence selon lequel l’entreprise pharmaceutique est tenue de payer la redevance courante. Elle ajoute que dans le contexte d’un accord de licence exclusif, l’obligation de payer une redevance, y compris après l’expiration de la durée de validité du brevet sous licence, peut procéder d’un jugement d’ordre commercial sur la valeur attribuée aux possibilités d’exploitation conférées par l’accord de licence. En outre, la Cour estime que le droit de la concurrence n’interdit pas d’imposer le paiement d’une redevance pour l’utilisation de la technologie, même si celle-ci ne donne pas lieu à contrefaçon voire est réputée ne jamais avoir été protégée en cas d’annulation rétroactive du brevet. Partant, la Cour conclut que l’article 101 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que, au titre d’un accord de licence tel que celui en cause, il soit imposé au licencié de payer une redevance pour l’utilisation d’une technologie brevetée pendant toute la période d’effectivité de cet accord, en cas d’annulation ou de non-contrefaçon du brevet sous licence, dès lors que le licencié a pu librement résilier ledit accord moyennant un préavis raisonnable. (NK)