Saisie de 3 requêtes dirigées contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 10 juillet dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Mugenzi c. France, requête n°52701/09, Tanda-Muzinga c. France, requête n°2260/10 et Senigo Longue e.a. c. France, requête n°19113/09). Les requérants, un ressortissant rwandais et un ressortissant congolais bénéficiant tous 2 du statut de réfugié, d’une part, et une ressortissante camerounaise ayant acquis la nationalité française, d’autre part, se plaignaient du refus opposé par les autorités consulaires à leur demande de délivrance de visas pour leurs enfants restés dans leur pays respectif. Si leur demande de regroupement familial a été acceptée sur le principe, les visas ont été refusés au motif qu’il était impossible pour les autorités françaises d’établir l’authenticité des certificats de naissance des enfants des requérants. En premier lieu, la Cour considère que les refus en cause ne constituent pas une ingérence dans l’exercice par les requérants de leur droit au respect de la vie privée et familiale dans la mesure où la décision de délivrer un visa est soumise aux impératifs d’ordre public. En second lieu, concernant les requérants bénéficiant du statut de réfugié, la Cour rappelle que l’unité familiale est un droit essentiel des réfugiés et que le regroupement familial est un élément fondamental pour leur permettre de reprendre une vie normale. Elle note que, s’agissant des moyens de preuve, les autorités nationales sont incitées à prendre en considération d’autres preuves de l’existence de liens familiaux si le réfugié n’est pas en mesure de fournir des pièces justificatives officielles. Concernant la troisième affaire, la Cour estime que la requérante a rencontré des difficultés pour participer utilement à la procédure, notamment en raison du manque d’explications des autorités françaises. Enfin, la Cour relève que les 3 requérants ont été confrontés à une accumulation de difficultés qui a mené à des délais excessifs compte tenu de leur situation particulière et de l’enjeu de la procédure. Partant, la Cour estime que la procédure de regroupement familial n’a pas fourni les garanties requises de flexibilité, de rapidité et d’efficacité pour assurer la conformité avec le respect de la vie familiale des requérants et conclut à la violation de l’article 8 de la Convention. (JD)