Saisie de 2 requêtes dirigées contre l’Italie, la Cour européenne des droits de l’homme a, notamment, interprété, le 24 septembre dernier, l’article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif, notamment, au droit à l’accès à un tribunal, et l’article 1er du Protocole n°1, relatif au droit de propriété (Pennino c. Italie, requête n°43892/04 et De Luca c. Italie, requête n°43870/04). La municipalité de Bénévent a été déclarée insolvable en décembre 1993 et sa gestion financière confiée à une commission extraordinaire de liquidation en janvier 1994. La législation, adoptée ultérieurement, prévoyait qu’entre le 31 décembre de l’année précédant le bilan rééquilibré et le rétablissement financier de la municipalité, aucune procédure de recouvrement des dettes ou des intérêts légaux ou compensatoires ne pourrait être engagée. Les requérants, créanciers de la municipalité, ont introduit des actions en dommages-intérêts contre la municipalité. En première instance, leurs recours ont été accueillis et la municipalité a été condamnée à leur verser des dommages-intérêts. La commission extraordinaire de liquidation a, ensuite, reconnu l’existence de dettes de la municipalité envers eux, mais les recours en exécution des jugements ont été déclarés irrecevables. A l’appui de leurs requêtes devant la CEDH, ils alléguaient que la législation ainsi adoptée les avait privés de la possibilité d’obtenir le recouvrement de leurs créances, ce qui constituait une ingérence illégale dans l’exercice de leur droit au respect de leurs biens garanti par l’article 1er du Protocole n°1. Ils invoquaient, par ailleurs, une violation de l’article 6 §1 de la Convention en ce que la législation les empêchait d’obtenir l’exécution des jugements de condamnation et les privait donc d’un recours effectif. La Cour rappelle, tout d’abord, qu’une créance peut constituer un bien au sens du Protocole n°1 si elle est suffisamment établie pour être exigible. Elle estime, ensuite, que les autorités nationales, en empêchant les requérants de percevoir l’argent qu’ils pouvaient raisonnablement s’attendre à obtenir, ont commis une ingérence dans la jouissance par les requérants de leur droit au respect de leurs biens. La Cour affirme donc que le manque de ressources d’une commune ne saurait justifier qu’elle omette d’honorer les obligations découlant d’un jugement définitif rendu en sa défaveur et conclut à la violation de l’article 1er du Protocole n°1. S’agissant du droit à un recours effectif, la Cour reconnaît que, si le but était légitime, la période excessivement longue de privation du droit d’accès à un tribunal la rendait disproportionnée. Elle conclut à une violation de l’article 6 §1 de la Convention. (JL)