Saisie d’une requête dirigée contre la Suisse, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 9 janvier dernier, les articles 5 §1 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à la liberté et à la sûreté et à l’absence de peine sans loi, ainsi que l’article 4 du Protocole 7 à la Convention relatif au droit à ne pas être jugé ou puni 2 fois (Kadusic c. Suisse, requête n°43977/13). Le requérant, ressortissant suisse, a été incarcéré à la suite d’une condamnation pénale. Atteint de troubles mentaux, une mesure thérapeutique suspendant la peine demeurant à exécuter lui a été appliquée quelques mois avant la date prévue de sa libération, à la suite de quoi il est resté incarcéré. Devant la Cour, le requérant alléguait que sa détention, à la suite l’application d’une mesure thérapeutique institutionnelle, constituait une violation de son droit à la liberté et à la sûreté, que cette mesure, qui n’existait dans le Code pénal suisse que depuis une date postérieure au déroulement des faits pour lesquels il avait été emprisonné, lui avait été appliquée de manière rétroactive et qu’il avait été puni 2 fois. S’agissant, tout d’abord, de la violation alléguée de l’article 5 §1 de la Convention, la Cour relève que la mesure litigieuse a été prise plus de 7 ans après la condamnation initiale du requérant et peu de temps avant sa libération, que le délai entre les expertises psychiatriques et le prononcé de la mesure a été excessif, la mesure ne se fondant donc pas sur des expertises suffisamment récentes, et que le requérant se trouvait, plus de 4 ans et demi après l’expiration de sa peine d’emprisonnement initiale, dans une institution manifestement inadaptée aux troubles dont il souffre. Elle affirme que la privation de liberté subie par le requérant n’était pas compatible avec les objectifs de la condamnation initiale et, partant, conclut à la violation de l’article 5 §1 de la Convention. S’agissant, ensuite, de la violation alléguée de l’article 7 de la Convention, la Cour observe que, lors de sa condamnation initiale, le juge aurait pu prononcer, sur la base d’un autre fondement juridique, une mesure thérapeutique qui n’aurait pas été moins sévère que celle ordonnée 7 ans après. Elle conclut à l’absence de rétroactivité d’une sanction plus lourde et, partant, à l’absence de violation de l’article 7 de la Convention. S’agissant, enfin, de la violation alléguée de l’article 4 du Protocole 7 à la Convention, la Cour observe que les autorités internes ont considéré l’établissement nouveau de l’état mental du requérant comme un fait nouvellement révélé, et ont procédé à la modification du jugement initial par l’application par analogie des règles sur la révision. La Cour constate que le requérant n’indique pas en quoi la réouverture du procès ne serait pas intervenue conformément à la loi et à la procédure pénale de l’Etat concerné. Partant, elle conclut à l’absence de violation de l’article 4 du Protocole 7 à la Convention. (MT)