L’avocat général propose à la Cour de justice de l’Union européenne de constater que la Pologne a manqué à son obligation de garantir une protection juridictionnelle effective en raison d’irrégularités manifestes dans la nomination de juges siégeant à la Cour constitutionnelle (11 mars)
Conclusions de l’avocat général Dean Spielmann dans l’arrêt Commission c. Pologne (Contrôle ultra vires de la jurisprudence de la Cour – Primauté du droit de l’Union), aff. C-448/23 (Grande chambre)
Saisie par la Commission européenne d’un recours en manquement à l’encontre de la Pologne en raison, d’une part, d’une série d’arrêts rendus par la Cour constitutionnelle et, d’autre part, de sa composition, la Cour est invitée à se prononcer sur le respect par cette juridiction des principes de primauté du droit de l’Union et de protection juridictionnelle effective par un tribunal impartial et indépendant établi par la loi. L’avocat général considère d’une part, qu’en rejetant la jurisprudence bien établie de la Cour garantissant à certains organes disciplinaires un pouvoir de contrôle de la régularité des procédures de nominations de certains juges et, d’autre part, en contestant la compétence de la Cour pour adopter des mesures provisoires suspendant la compétence d’un organe disciplinaire de contrôle qui ne remplissait pas les conditions d’impartialité et d’indépendance, la Pologne a manqué à son obligation d’assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union. S’il considère également que la clause relative à l’identité nationale prévue par les traités ne saurait limiter le principe intangible de primauté et aller à l’encontre des valeurs fondamentales de l’Union, l’avocat général reconnaît toutefois qu’il appartient à la Cour de trancher définitivement un conflit entre le droit de l’Union et l’identité constitutionnelle d’un Etat membre. Enfin, il rappelle que la nomination des membres d’une juridiction doit être opérée de manière à écarter tout doute légitime quant à leur impartialité. Partant, la Cour est invitée à reconnaître que la Pologne a manqué à ses obligations en vertu de l’article 19 TUE. (BM)