Saisie de 2 renvois préjudiciels par la Corte suprema di cassazione (Italie), la Grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 20 mars dernier, l’article 14 de la directive 2003/6/CE sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché, lu à la lumière de l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne relatif au principe ne bis in idem qui garantit le droit à ne pas être jugé ou puni pénalement 2 fois pour une même infraction (Consob, aff. jointes C-596/16 et C-597/16). Dans les affaires au principal, 2 personnes se sont vues infliger des sanctions administratives pécuniaires par la commission nationale des sociétés et de la bourse italienne (« Consob ») en raison d’opérations d’initiés. Dans le cadre d’une procédure pénale ayant trait aux mêmes faits, l’une des 2 personnes sanctionnées a fait l’objet d’un jugement de relaxe, les faits établissant l’opération d’initié n’ayant pas été constatés. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour, notamment, sur le point de savoir si le droit de l’Union européenne s’oppose à une disposition nationale qui étend à la procédure de sanction administrative pécuniaire l’autorité de la chose jugée des constations factuelles opérées dans le cadre d’une procédure pénale. Tout d’abord, la Cour relève qu’aucune disposition de la directive ne précise les effets d’un jugement pénal définitif de relaxe sur la procédure de sanction administrative pécuniaire. Ensuite, la Cour souligne l’importance du principe de l’autorité de la chose jugée, tant dans l’ordre juridique de l’Union que dans les ordres juridiques nationaux, et par conséquent, elle rappelle que le droit de l’Union n’exige pas d’écarter l’application des règles de procédure nationales conférant l’autorité de la chose jugée à une décision juridictionnelle. La Cour souligne, enfin, que l’autorité de la chose jugée encadrée par la disposition litigieuse se limite aux constations factuelles opérées par un jugement pénal prononcé à la suite d’une procédure contradictoire. Dès lors, une infraction à la législation relative aux opérations d’initiés peut être constatée et sanctionnée de manière effective si la procédure pénale conclut à l’établissement des faits en cause. La Cour souligne, à ce titre, que la protection conférée par l’article 50 de la Charte ne se limite pas à la situation dans laquelle la personne concernée a fait l’objet d’une condamnation pénale mais s’étend également à celle dans laquelle cette personne est définitivement acquittée. Partant, la Cour conclut qu’une disposition nationale peut prévoir qu’une procédure de sanction administrative pécuniaire de nature pénale ne peut être poursuivie à la suite d’un jugement pénal définitif de relaxe ayant constaté que les faits susceptibles de constituer une infraction à la législation sur les opérations d’initiés n’étaient pas établis. (CH)