Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Bundesgerichtshof (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 25 octobre dernier, l’article 10 §1 et §2, sous a), de la première directive 89/104/CEE rapprochant les législations des Etats membres sur les marques (Rintisch, aff. C-553/11). Titulaire des marques verbales PROTIPLUS et PROTI et de la marque verbale et figurative Proti Power, le demandeur au principal a introduit une action devant les juridictions allemandes tendant à enjoindre le défendeur au principal à radier la marque verbale postérieure Protifit, dont il est le titulaire, et à lui en interdire l’utilisation. La juridiction de renvoi a considéré que le requérant avait fait un usage sérieux des marques PROTIPLUS et Proti Power avant la publication de l’enregistrement de la marque Protifit. Elle en a déduit que la marque PROTI, dont PROTIPLUS et Proti Power sont des dérivés, avait, de ce fait, également fait l’objet d’un usage sérieux au sens de l’article 26 §3 de la loi allemande sur la protection des marques et autres signes distinctifs. Elle s’est toutefois interrogée sur la compatibilité de cette dernière disposition avec à l’article 10 §2, sous a) de la directive relatif à l’usage d’une marque, notamment, en ce qui concerne la faculté ouverte ou non au titulaire d’une marque enregistrée de se prévaloir, au fin d’établir l’usage de celle-ci, de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée. La Cour précise, tout d’abord, que le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce que le titulaire d’une marque enregistrée puisse, aux fins d’établir l’usage de celle-ci au sens de cette disposition, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque. Elle indique, ensuite, que l’article 10 §2, sous a) s’oppose à une interprétation de la disposition nationale visant à transposer ledit article en droit interne en ce sens que cette dernière disposition ne s’applique pas à une marque « défensive » dont l’enregistrement n’a d’autre fin que de garantir ou d’élargir le champ de la protection d’une autre marque enregistrée, qui l’est dans la forme sous laquelle elle est utilisée. (JBL)