La sanction infligée à un magistrat pour le partage, sur un réseau social réservé à ses confrères, d’un article de presse s’interrogeant sur l’indépendance du pouvoir judiciaire est une violation du droit à la liberté d’expression (1er mars)
Arrêt Kozan c. Turquie, requête n°16695
La Cour EDH rappelle que la mission particulière du pouvoir judiciaire dans la société impose au magistrat un devoir de réserve, la parole de celui-ci étant reçue comme une appréciation objective qui engage l’institution de la justice. En l’espèce, elle constate que l’article sur Facebook portait atteinte à la confiance du public dans l’institution judiciaire de sorte que la sanction constituait une ingérence poursuivant un but reconnu comme légitime par la Convention. Toutefois, la Cour EDH relève que les jugements de valeur exprimés s’inscrivaient dans un débat sur l’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis de l’exécutif ayant un intérêt particulier pour les membres de la profession. En outre, l’article n’a pas été partagé au grand public, mais dans un groupe de discussion réservé aux professionnels de la magistrature. Ainsi, considérant l’importance primordiale de la liberté d’expression sur les questions d’intérêt général, la sanction ne répondait à aucun besoin social impérieux, et de ce fait, ne constituait pas une mesure nécessaire dans une société démocratique. Partant, la Cour EDH conclut à la violation de l’article 10 de la Convention. (CF)