La décision des autorités politiques de cesser prématurément le mandat d’un membre du Conseil national de la magistrature (« CNM ») polonais à la suite d’une réforme législative, sans que celui-ci ne puisse exercer de recours contre cette décision, a entraîné une violation de l’article 6 §1 de la Convention (15 mars)
Arrêt Grzeda c. Pologne (Grande chambre), requête n°43572/18La Cour EDH rappelle tout d’abord que conformément à sa jurisprudence Eskeline (requête n°63235/00), les autorités nationales ne peuvent invoquer le statut de fonctionnaire afin de justifier l’absence de recours devant un tribunal qu’en cas de motifs objectifs liés à l’intérêt de l’Etat. Or, en l’espèce, elle constate que les autorités politiques n’ont pas prouvé que l’impossibilité de contester la cessation prématurée des fonctions d’un magistrat au CNM était justifiée. Ensuite, la Cour EDH souligne que seule une supervision par un organe judiciaire permet de garantir aux magistrats, la protection essentielle contre l’arbitraire des pouvoirs exécutif et législatif. Ainsi, eu égard à l’importance du mandat du CNM pour la protection de l’indépendance de la justice, elle considère que les membres ayant été démis prématurément de leurs fonctions doivent avoir les mêmes garanties procédurales que celles s’appliquant aux cas de révocation ou destitution d’un magistrat. Enfin, la Cour EDH relève que cette décision est intervenue dans une tendance générale d’affaiblissement de l’indépendance de la justice en raison des réformes successives entreprises par le gouvernement polonais. Partant, elle conclut à la violation de l’article 6 §1 de la Convention. (CF)