Saisie de 4 requêtes dirigées contre le Royaume-Uni, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 13 septembre dernier, les articles 6 §1 et 6 §3, sous c), de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et au droit à l’assistance d’un avocat (Ibrahim e.a. c. Royaume-Uni, requêtes n°50541/08, 50571/08, 50573/08 et 40351/01). Trois des requérants, de nationalité somalienne, ont été arrêtés car soupçonnés d’avoir enclenché des bombes dans le réseau de transports publics de Londres. Ceux-ci ont été interrogés dans le cadre d’un interrogatoire de sûreté conduit en urgence avant de recevoir l’assistance d’un avocat. Le 4e requérant, de nationalité britannique, a été auditionné en tant que témoin en l’absence d’assistance juridique. Au cours de son audition, il est apparu qu’il avait aidé l’un des poseurs de bombes. A ce stade, ses droits ne lui ont pas été notifiés et aucune assistance d’un avocat ne lui a été proposée. Les requérants alléguaient une violation des articles 6 §1 et 6 §3 de la Convention du fait du report de leur accès à l’assistance d’un avocat et de l’admission lors de leurs procès de déclarations faites en l’absence de leurs conseils. La Cour rappelle que les exigences générales d’équité posées à l’article 6 de la Convention s’appliquent à toutes les procédures pénales, quel que soit le type d’infraction concerné, sans que son application cause aux autorités des difficultés excessives pour combattre par des mesures effectives le terrorisme et d’autres crimes graves. S’agissant de l’accès à un avocat, la Cour rappelle que dans des circonstances exceptionnelles, l’assistance juridique peut être reportée à condition que cela soit justifié par des raisons impérieuses et en examinant l’incidence de la restriction sur l’équité globale de la procédure. S’agissant du droit de ne pas témoigner contre soi-même, la Cour précise que ce dernier s’apprécie au regard de la nature et du degré de la contrainte dont il a été fait usage et cite, par exemple, les menaces, les pressions physiques ou psychologiques ou l’utilisation de subterfuges pour extorquer des informations. Concernant les 3 premiers requérants, elle constate que le régime légal de l’interrogatoire de sûreté a été strictement respecté et que l’équité de la procédure dans son ensemble a été préservée. Partant, elle conclut à la non-violation des dispositions de la Convention. En revanche, s’agissant du 4e requérant, elle considère que la restriction de son droit à une assistance juridique n’était pas justifiée par des raisons impérieuses et note que plusieurs lacunes procédurales ont entaché le procès. Partant, elle conclut à la violation des dispositions de la Convention à son égard. (JL)