Saisie d’un renvoi préjudiciel par l’Oberster Gerichtshof (Autriche), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 9 mars dernier, l’article 1er §1, alinéa 2 de la directive 77/249/CEE tendant à faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats (Piringer, aff. C-342/15). Dans l’affaire au principal, la propriétaire d’un bien immobilier situé en Autriche a signé en République tchèque une demande d’inscription au livre foncier autrichien du projet de vente dudit bien. Cette signature a été authentifiée par un avocat tchèque mais cette authentification a été rejetée par un tribunal autrichien au motif que la signature de la requérante n’avait pas été authentifiée par un tribunal ou un notaire, conformément aux prescriptions du droit national. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir s’il convient d’interpréter la directive 77/249/CEE et l’article 56 TFUE en ce sens qu’un Etat membre peut réserver l’authentification de documents nécessaires à la création ou au transfert de droits réels immobiliers aux notaires. La Cour considère que la notion d’« activité d’avocat » au sens de la directive couvre non seulement les services juridiques usuellement fournis par les avocats, tels que le conseil juridique ou la représentation d’un client en justice, mais également d’autres types de prestations telles que l’authentification de signatures. Néanmoins, si la libre prestation de services est susceptible de s’appliquer dans les circonstances de l’affaire au principal, la dérogation établie par l’article 1er §1 de la directive 77/249/CEE ne s’applique pas à une règlementation telle que celle en cause qui réserve aux notaires l’authentification des signatures, dans la mesure où celle-ci ne saurait concerner qu’une catégorie d’avocats. A propos de la seconde question, la Cour considère qu’une réserve de compétence au profit des notaires telle que celle en cause en principal constitue une entrave à la libre prestation de services, bien que non discriminatoire. Si celle-ci n’est pas justifiée en vertu d’une dérogation du traité, elle est justifiée en vertu d’une raison impérieuse d’intérêt général. Selon la Cour, le livre foncier revêt dans certains Etats membres une importance décisive dans le cadre des transactions immobilières et des dispositions nationales qui imposent de vérifier l’exactitude des inscriptions portées à celui-ci contribuent à garantir la bonne administration de la justice. A cet égard, la Cour établit que la mesure est appropriée pour atteindre cet objectif et que, l’activité des avocats consistant à certifier l’authenticité des signatures apposées sur des actes n’étant pas comparable à l’activité d’authentification effectuée par les notaires, elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci. Partant, la Cour juge que l’article 56 TFUE ne s’oppose pas à la règle en cause réservant aux notaires l’authentification de signatures nécessaire à la création ou au transfert de droits réels immobiliers. (JJ)