Saisie de quatre requêtes dirigées contre le Royaume-Uni, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 15 janvier dernier, les articles 9 et 14 la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, à la liberté de religion et à l’interdiction de discrimination (Eweida e.a. c. the United Kingdom,requêtes n°48420/10, n°59842/10, n°51671/10 et n°36516/10 – disponible uniquement en anglais). Les quatre requérants, ressortissants britanniques et chrétiens pratiquants, alléguaient que le droit anglais n’avait pas suffisamment protégé leur droit de manifester leur religion. Mesdames Eweida, employée de British Airways, et Chaplin, infirmière gériatrique, se plaignaient de s’être vues interdire, par leurs employeurs respectifs, de porter de manière visible une croix chrétienne sur leur lieu de travail. Madame Ladele, officier d’état civil, et Monsieur McFarlane, conseiller conjugal et sexuel, se plaignaient d’avoir été licenciés suite à leur refus de s’acquitter de certaines tâches dont ils considéraient qu’elles revenaient à reconnaître l’homosexualité. La Cour rappelle que si la liberté de religion implique la liberté de manifester sa religion sur le lieu de travail, elle peut faire l’objet de restrictions. Elle souligne, ensuite, que l’absence, en droit anglais, de disposition protégeant expressément le port de vêtements ou de symboles religieux sur le lieu de travail n’emporte pas en soi violation du droit de manifester sa religion, les questions soulevées par les requérants ayant pu être examinées par les juridictions internes. Concernant Madame Eweida, la Cour conclut à une violation de l’article 9 de la Convention en ce que les autorités n’ont pas ménagé un juste équilibre entre, d’une part, le désir de la requérante de manifester sa foi et de pouvoir la communiquer à autrui et, d’autre part, le souhait de son employeur de véhiculer une certaine image de marque. En revanche, concernant Madame Chaplin, la Cour conclut à la non-violation de l’article 9 de la Convention au motif que les intérêts en présence, à savoir la protection de la santé et la sécurité clinique, étaient graves et que les responsables d’un hôpital étaient les mieux placés pour prendre des décisions en cette matière. Concernant Madame Ladele et Monsieur McFarlane, la Cour estime que la promotion de l’égalité des chances et l’obligation faite aux employés d’éviter tout comportement discriminatoire à l’égard d’autrui poursuivent le but légitime de protéger les droits des couples homosexuels, garantis par la Convention et la jurisprudence de la Cour. Dès lors, la Cour conclut à la non-violation des articles 9 et 14 de la Convention. (SC)