Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Nederlandstaligerechtbank van eerste aanleg Brussel (Belgique), la Cour de justice de l’Union européenne a examiné, le 29 mai dernier, la compatibilité de l’article 4§4 du règlement 1099/2009/CE avec l’article 10 de la Charte des droits fondamentaux, lequel est relatif, notamment, à la liberté religieuse (Liga van Moskeeën en Islamitisch Organisaties, aff. C-426/16). Dans l’affaire au principal, le ministre flamand en charge du bien-être des animaux a annoncé qu’il ne délivrerait plus d’agréments à des sites d’abattage temporaires où il serait possible de pratiquer l’abattage rituel pendant la fête musulmane du sacrifice, au motif que de tels agréments étaient contraires au règlement. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si, en mettant en œuvre l’article 4 §4 du règlement, la décision contestée créait une limitation à l’exercice de la liberté de religion en raison du fait qu’elle obligerait les musulmans à effectuer l’abattage rituel pendant la fête musulmane du sacrifice dans les abattoirs agréés. La Cour relève, tout d’abord, que l’abattage rituel en cause au principal constitue un rite célébré chaque année par un nombre élevé de musulmans pratiquants en Belgique afin de respecter un précepte religieux spécifique qui consiste dans l’obligation d’abattre ou de faire abattre, sans étourdissement préalable, un animal dont la viande est en partie mangée en famille, et qui relève donc bien de la notion de « rite religieux » au sens de l’article 4 §4 du règlement. Ensuite, la Cour déduit de la lecture combinée des articles 4 §1 et §4 et 2, sous k), du règlement, que la pratique de l’abattage rituel sans étourdissement préalable est autorisée, à titre dérogatoire, dans l’Union européenne, pour autant qu’un tel abattage a lieu dans un établissement soumis à un agrément qui respecte les exigences techniques prévues par le règlement 853/2004/CE fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale. Selon elle, la dérogation n’établit aucune interdiction de la pratique mais concrétise l’engagement positif du législateur de l’Union de permettre la pratique de l’abattage d’animaux sans étourdissement préalable afin d’assurer le respect effectif de la liberté de religion. Un tel encadrement technique n’est pas de nature, selon la Cour, à entraîner, en elle-même, une limitation du droit à la liberté de religion des musulmans pratiquants. Enfin, la Cour estime que la validité d’une disposition du droit de l’Union s’apprécie en fonction des caractéristiques propres à cette disposition et ne saurait dépendre des circonstances particulières d’un cas d’espèce donné. Ainsi, le fait que l’application de l’article 4 §4 puisse limiter la liberté de pratiquer les abattages rituels dans une région d’un Etat membre particulier, en raison d’un problème ponctuel de capacité d’abattage sur ce territoire, n’est pas de nature à affecter la validité de cette disposition au regard de l’article 10 de la Charte. (JJ)