Saisie d’une requête dirigée contre la Finlande, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 20 octobre dernier, l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à la liberté d’expression (Pentikaïnen c. Finlande, requête n°11882/10). Le requérant, un journaliste, ressortissant finlandais, assurait le suivi d’une manifestation qui, à la suite de violences, a été dispersée par la police. Il ne s’est pas conformé aux ordres de dispersement et a été arrêté, placé en garde à vue et condamné. Il se plaignait que son interpellation, son placement en garde à vue et sa condamnation portaient atteinte à son droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 10 de la Convention, en ce qu’il avait été empêché de faire son travail de journaliste. La Cour constate, tout d’abord, qu’il y a eu une ingérence dans le droit à la liberté d’expression du fait de l’atteinte à l’exercice de ses activités. Elle relève, ensuite, que cette ingérence a une base légale et qu’elle répond à plusieurs buts légitimes, notamment la prévention des infractions. La Cour analyse, enfin, si l’ingérence est nécessaire dans une société démocratique. S’agissant de l’interpellation, elle relève que le requérant a pris le risque d’être arrêté en ne se conformant pas aux ordres de la police qui reposaient sur une appréciation raisonnable de la situation. S’agissant du placement en garde à vue, la Cour observe que l’appareil photo du requérant et les clichés ont été mis de côté le temps de son interrogatoire et ont été intégralement restitués dans leur état originel. S’agissant de la condamnation, elle constate que le requérant a été reconnu coupable d’atteinte à l’autorité de la police mais qu’aucune peine ne lui a été infligée. La Cour souligne que ce n’est pas l’activité de journaliste qui a été sanctionnée mais le refus d’obtempérer aux ordres de la police. En outre, elle considère que les journalistes ne sauraient être déliés de leur devoir de respecter les lois pénales du seul fait qu’ils sont protégés par l’article 10 de la Convention. Ainsi, un journaliste qui ne respecte pas les lois pénales doit savoir qu’il s’expose à des sanctions juridiques. Par ailleurs, la Cour relève que la condamnation n’a pas eu de conséquences négatives sur le requérant puisqu’elle n’a pas été inscrite à son casier judiciaire et qu’aucune peine ne lui a été infligée. Partant, la Cour considère que l’ingérence est nécessaire dans une société démocratique et conclut à la non-violation de l’article 10 de la Convention. (MS)