France / Suicide en détention / Schizophrénie / Risque réel et immédiat / Droit à la vie / Arrêt de la CEDH (Leb 754)

Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 8 octobre dernier, l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à la vie (Sellal c. France, requête n°32432/13). Dans l’affaire au principal, un homme atteint de schizophrénie a été incarcéré après ne pas avoir respecté ses obligations de soin dans le cadre d’une libération conditionnelle. Lors de son incarcération, sa relation avec sa compagne a pris fin. Après avoir appris que les parloirs organisés avec sa famille avaient été annulés, le détenu s’est suicidé. Invoquant l’article 2 de la Convention, la famille du défunt reprochait aux autorités internes de ne pas avoir évalué le risque suicidaire de ce dernier alors que des éléments objectifs présageaient de la réalité d’un tel risque. La Cour rappelle, tout d’abord, que l’article 2 de la Convention astreint l’Etat à prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie des personnes relevant de sa juridiction. Elle estime, ainsi que lorsque les autorités nationales savent ou devraient savoir qu’il existe un risque réel et immédiat qu’un détenu porte atteinte à sa vie, elles sont tenues de prendre des mesures concrètes pour en prévenir la réalisation. La Cour constate, en l’espèce, que les autorités connaissaient la vulnérabilité et les troubles psychiatriques du défunt. Elle observe, cependant, que le dossier médical et pénal de ce dernier ne présentait aucun élément évocateur du risque suicidaire. Elle considère, par ailleurs, que les autorités nationales ont réalisé suffisamment d’efforts pour vérifier s’il existait un tel risque, en ayant, notamment, rempli la grille d’aide au signalement des personnes détenues présentant un risque suicidaire dont l’objet est précisément d’identifier l’existence d’un risque et d’en déterminer l’ampleur. Enfin, la Cour estime que l’annulation des parloirs familiaux, ainsi que la rupture entre le détenu et sa compagne, n’apparaissaient pas pouvoir, à eux seuls, être de nature à modifier l’appréciation faite par les autorités internes quant à l’existence ou non d’un risque de suicide. Partant, la Cour conclut à la non-violation de l’article 2 de la Convention. (KO)

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