Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 13 juin dernier, l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à un procès équitable (Marc-Antoine c. France, requête n°54984/09). Le requérant, ressortissant français exerçant la fonction de conseiller au sein d’un tribunal administratif, a demandé l’annulation de 2 décrets arrêtant la liste des conseillers inscrits au tableau d’avancement, lesquels ne retenaient pas sa candidature. A la suite du rejet de sa requête par le Conseil d’Etat, il alléguait une violation de son droit à un procès équitable, au motif qu’il ne s’était pas vu communiquer, au cours de la procédure et contrairement au rapporteur public, le projet de décision du conseiller rapporteur. La Cour rappelle qu’elle a déjà jugé que le rapport du conseiller rapporteur devant le Conseil d’Etat ne contient qu’un « simple résumé des pièces » du dossier, lesquelles sont en possession des demandeurs au pourvoi. Ainsi, il ne saurait être valablement soutenu que la possession d’un document résumant les pièces du dossier puisse créer une situation de net désavantage. S’agissant du projet de décision du conseiller rapporteur, la Cour considère qu’il ne constitue pas une pièce produite par une partie et n’est pas susceptible d’influencer la décision juridictionnelle. Elle considère que celui-ci est un document de travail interne à la formation de jugement, couvert par le secret, qui ne saurait être soumis au principe du contradictoire. La Cour estime, ensuite, que les conclusions du rapporteur public, en ce qu’elles intègrent l’analyse du conseiller rapporteur diffusée notamment dans son projet de décision, sont de nature à permettre aux parties de recevoir les éléments décisifs du dossier et la lecture qu’en fait la juridiction, leur offrant ainsi l’opportunité d’y répondre avant que les juges n’aient statué. Elle considère donc que cette particularité procédurale, qui permet aux justiciables de saisir la réflexion de la juridiction pendant qu’elle s’élabore et de faire connaître leurs dernières observations avant que la décision ne soit prise, ne porte pas atteinte au caractère équitable du procès. Partant, la Cour conclut que la communication du projet de décision au rapporteur public n’a placé le requérant dans aucune situation de désavantage, pas plus qu’elle n’a été préjudiciable pour la défense de ses intérêts civils. (SB)