Saisie d’un recours en manquement introduit par la Commission européenne à l’encontre de la France, la Cour de justice de l’Union européenne a considéré, le 15 décembre dernier, que la France a manqué à ses obligations en raison d’une instruction administrative 3 A-9-06, du 23 juin 2006, contraire à la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (Commission / France, aff. C-624/10). La Cour constate que l’instruction administrative litigieuse prévoit une tolérance administrative dérogeant à un régime d’autoliquidation de la TVA et impliquant la désignation d’un répondant fiscal par le vendeur ou le prestataire établi hors de France, ainsi que son identification à la TVA en France et la compensation entre la TVA déductible qu’il a supportée et celle qu’il a collectée au nom et pour le compte de ses clients. La Cour précise, d’une part, que l’instruction administrative 3 A-9-06 est contraire à l’article 204 de la directive TVA dès lors qu’elle subordonne la possibilité pour l’assujetti non établi et son client de déroger au régime d’autoliquidation, prévue par la législation française, à la condition que cet assujetti désigne un répondant devant se faire accréditer par le service des impôts et s’engager à déclarer et à acquitter la TVA due par l’assujetti non établi, peu important que ce régime dérogatoire soit facultatif et qu’il ait été prévu, sous la forme d’une tolérance administrative, pour offrir des facilités aux opérateurs économiques et peu important également que la personne ainsi désignée ne soit pas, au sens de la législation nationale, le redevable de la TVA. La Cour rappelle, d’autre part, sa jurisprudence relative à l’article 214 de la directive TVA. Selon elle, cette disposition tend à éviter des fraudes ou des évasions fiscales, de sorte que, l’Etat membre qui souhaite introduire des mesures particulières dérogatoires à la directive TVA doit obtenir l’autorisation du Conseil conformément à l’article 395 §1 de la directive. Enfin, la Cour énonce que la TVA déductible peut uniquement être imputée sur la TVA dont l’assujetti non établi est, le cas échéant, lui-même redevable en France ou bien lui être remboursée selon les modalités prévues par la directive 79/1072/CEE ou la directive 86/560/CEE. Elle ne peut donc pas être déduite de la TVA dont sont redevables d’autres assujettis. La Cour conclut que la France a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de la directive. (MR)