Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 7 février dernier, l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à l’interdiction de discrimination et l’article 1 du Protocole n°1 relatif au droit de propriété (Fabris c. France, requête n°16574/08). Le requérant, ressortissant français reconnu enfant naturel par décision de justice, a fait opposition à la donation-partage des biens de sa mère entre les deux enfants légitimes de celle-ci. Cette demande ayant été refusée, le requérant se plaint de l’impossibilité de faire valoir ses droits successoraux et dénonce la persistance d’une discrimination injustifiée envers les enfants « adultérins ». La Cour rappelle, tout d’abord, que l’article 14 interdit de traiter de manière différente, sauf justification objective et raisonnable, des personnes placées dans des situations comparables. La distinction établie en matière successorale entre enfants naturels et enfants légitimes constitue une discrimination. La Cour indique, toutefois, que le souci d’assurer la stabilité des règlements successoraux achevés constitue un but légitime susceptible de justifier la différence de traitement, dans la mesure où celle-ci est proportionnée par rapport à ce but. Or, en l’espèce, le fait que le recours en réduction de la donation-partage exercé par le requérant en 1998 était toujours pendant en 2001, date à laquelle la France a modifié sa législation et a accordé des droits successoraux identiques à tous les enfants, ne peut que relativiser l’attente des autres héritiers. La Cour considère donc que le but légitime de la protection des droits successoraux du demi-frère et de la demi-sœur du requérant n’était pas d’un poids tel qu’il devait l’emporter sur la prétention du requérant d’obtenir une part de l’héritage de sa mère. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 1 du Protocole n°1. (SB)