Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée, le 5 février dernier, sur la recevabilité d’une requête alléguant une violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à un procès équitable (NML Capital LTD c. France, requête n°23242/12). La requérante, société d’investissement de droit des îles Caïman, avait acquis, auprès de l’Argentine, des participations provenant de 2 séries d’obligations de dette souveraine, soumises aux conditions d’une convention d’agence financière. Celle-ci prévoyait la renonciation à l’immunité de juridiction et d’exécution dont jouit l’Argentine en tant qu’Etat souverain et reconnaissait la compétence de tout tribunal fédéral ou d’Etat de la ville de New York. A la suite du défaut de paiement de l’Argentine, la requérante a engagé une action en paiement devant le tribunal fédéral du district de New York. La juridiction américaine a condamné l’Argentine à payer à la requérante la somme de 285 millions de dollars. En l’absence d’exécution volontaire du jugement par l’Argentine, la requérante a tenté de faire saisir des biens mobiliers appartenant à l’Argentine dans différents pays. En France, la requérante a fait pratiquer une saisie conservatoire. L’Etat débiteur a ensuite sollicité et obtenu la mainlevée de la saisie devant le juge de l’exécution sur le fondement de son immunité d’exécution. Ce jugement a été confirmé par la Cour d’appel de Paris puis par la Cour de cassation. Invoquant l’article 6 de la Convention, la requérante alléguait que l’immunité d’exécution diplomatique dont avait bénéficié l’Argentine l’avait privée de son droit à l’exécution d’une décision de justice, qui fait partie intégrante du droit d’accès à un tribunal. La Cour rappelle qu’elle ne peut être saisie qu’après épuisement des voies de recours internes. A ce titre, elle relève que la requérante, qui soutient que l’effectivité de l’exequatur du jugement américain avait été compromise du fait de la mainlevée de la saisie conservatoire, disposait encore d’une voie de recours devant les juridictions administratives lui permettant d’engager la responsabilité de l’Etat sur le fondement de la rupture d’égalité devant les charges publiques. Elle précise, en outre, que l’incertitude quant aux perspectives de succès de ce recours ne constitue pas une raison valable pour déroger à ce principe. Partant, elle conclut au rejet de la requête. (DH)