Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Cour de cassation (France), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 7 juin dernier, la directive 2008/115/CE relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (Selina Affum, aff. C-47/15). Dans le litige au principal, la requérante, d’origine ghanéenne, a été placée en garde à vue pour être entrée de façon irrégulière en France alors qu’elle transitait depuis la Belgique pour rejoindre le Royaume-Uni. Le préfet, saisi de la situation administrative de la requérante, a ordonné son placement en rétention administrative, dans l’attente de son éloignement vers la Belgique. La requérante contestait la prolongation de la durée de sa rétention administrative au motif, d’une part, que son placement en garde à vue était entaché d’irrégularité, viciant l’ensemble de la procédure et, d’autre part, qu’un tel emprisonnement était susceptible de faire échec à la procédure de retour et de retarder celui-ci. Saisie dans ce contexte, la Cour rappelle, tout d’abord, qu’un ressortissant d’un pays tiers qui est présent sur le territoire d’un Etat membre sans remplir les conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans celui-ci se trouve, de ce seul fait, en situation de séjour irrégulier, sans que cette présence ne soit soumise à une condition de durée minimale. Toutefois, les notions de « séjour » et d’« entrée irrégulière » étant étroitement liées dans la mesure où l’entrée irrégulière constitue l’une des circonstances de fait qui peut conduire au séjour irrégulier, la Cour souligne que la directive s’oppose à toute réglementation d’un Etat membre qui réprime le séjour irrégulier par l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers pour lequel la procédure de retour n’a pas été menée à son terme. La Cour estime, ensuite, que si la directive s’oppose à la réglementation d’un Etat membre réprimant le séjour irrégulier par des sanctions pénales, elle ne s’oppose ni au placement en rétention administrative en vue de la détermination du caractère régulier ou non du séjour, ni à l’emprisonnement d’un ressortissant de pays tiers auquel la procédure de retour a été appliquée et qui continue à séjourner irrégulièrement sur le territoire de l’Etat membre sans motif justifié. La Cour considère, enfin, qu’au regard des exceptions prévues par la directive, les Etats membres ne peuvent soustraire un ressortissant d’un pays tiers du champ d’application de la directive, au motif qu’il a franchi irrégulièrement une frontière intérieure de l’espace Schengen ou qu’il a été arrêté lors de sa tentative de quitter cet espace. En effet, la situation de transit de la requérante ne rend pas inapplicable la directive, dans la mesure où sa réadmission vers la Belgique avait simplement pour effet de transférer l’obligation d’appliquer la procédure de retour à l’Etat membre chargé de reprendre le ressortissant. (NK)