France / Acte national incompatible avec le droit de l’Union européenne / Modulation des effets de l’annulation / Obligation de saisir la CJUE / Arrêt de la Cour (Leb 779)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Conseil d’Etat (France), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 28 juillet dernier, l’article 267 TFUE relatif au renvoi préjudiciel. Dans l’affaire au principal, le requérant a introduit un recours en annulation d’un décret concernant les plans et programmes devant faire l’objet d’une évaluation environnementale en faisant, notamment, valoir une méconnaissance d’une disposition du droit de l’Union européenne (Association France Nature Environnement, aff.C-379/15). Le Conseil d’Etat a accueilli favorablement la demande d’annulation. Toutefois, considérant que la rétroactivité de l’annulation du décret était susceptible de porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la réalisation des objectifs de l’Union, il a posé à la Cour les questions de savoir, d’une part, sous quelles conditions une juridiction nationale saisie d’un litige peut limiter dans le temps certains effets d’une déclaration d’illégalité d’une disposition du droit national adoptée en méconnaissance d’une directive et, d’autre part, s’il est dans tous les cas tenu de saisir la Cour à titre préjudiciel avant de faire usage de cette faculté. S’agissant de la première question, la Cour rappelle, tout d’abord, que les Etats membres sont tenus d’effacer les conséquences illicites d’une violation du droit de l’Union et qu’une telle obligation incombe à chaque organe de l’Etat membre concerné. Elle affirme, ensuite, que seule la Cour peut, à titre exceptionnel et pour des considérations impérieuses de sécurité juridique, accorder une suspension provisoire de l’effet de l’éviction exercé par une règle du droit de l’Union à l’égard du droit national contraire à celle-ci. Toutefois, elle rappelle avoir déjà admis, au cas par cas, et à titre exceptionnel, à une juridiction nationale la faculté d’aménager les effets de l’annulation d’une disposition nationale jugée incompatible avec le droit de l’Union. A cet égard, la Cour rappelle les conditions entourant cette faculté et, notamment, que la disposition du droit national constitue une mesure de transposition correcte du droit de l’Union en matière de protection de l’environnement, que l’adoption d’une nouvelle disposition ne permet pas d’éviter les effets préjudiciables sur l’environnement, que l’annulation de l’acte crée un vide juridique préjudiciable à l’environnement et que le maintien exceptionnel ne couvre que le laps de temps strictement nécessaire à l’adoption de mesures permettant de remédier à l’irrégularité constatée. S’agissant de la seconde question, la Cour rappelle les cas dans lesquels le renvoi préjudiciel s’impose aux juridictions nationales et précise que la juridiction nationale ne pourrait être dispensée de saisir la Cour à titre préjudiciel que si elle est convaincue que la faculté de limiter dans le temps les effets de l’annulation ne soulève aucun doute raisonnable et que l’absence d’un tel doute est démontrée de manière circonstanciée. (JL)

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