Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Landgericht Berlin (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 10 avril dernier, les articles 18 et 21 TFUE relatifs au principe de non-discrimination et de libre circulation des citoyens de l’Union européenne (Pisciotti, aff. C-191/16). Dans l’affaire au principal, le requérant, ressortissant italien, a été arrêté en Allemagne où il transitait à l’occasion d’un voyage entre le Nigéria et l’Italie. Celui-ci faisait l’objet d’une demande d’extradition des Etats-Unis en vertu de l’accord entre l’Union et les Etats-Unis sur l’extradition (« accord UE-EU »). Le requérant a été placé en détention puis extradé et condamné aux Etats-Unis pour avoir participé à des ententes anticoncurrentielles. Il a introduit un recours en responsabilité contre l’Allemagne au motif qu’il aurait fait l’objet d’une discrimination en ce qu’il n’a pas pu bénéficier de la protection contre l’extradition prévue par la Constitution allemande pour les ressortissants allemands. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si le droit de l’Union s’oppose à ce qu’un Etat membre établisse, sur le fondement d’une norme constitutionnelle, une distinction entre ses ressortissants et les ressortissants d’autres Etats membres, en autorisant l’extradition de ces derniers et non celle de ses propres ressortissants. La Cour relève que l’accord UE-EU permet à un Etat membre de réserver, sur le fondement de normes constitutionnelles ou d’un traité bilatéral, un régime particulier à ses ressortissants en interdisant leur extradition. Toutefois, elle estime que l’usage de cette faculté doit se faire en conformité avec le droit primaire de l’Union et rappelle que l’inégalité de traitement consistant à permettre l’extradition d’un citoyen de l’Union, non ressortissant de l’Etat membre requis, constitue une restriction au principe de liberté de circulation. La Cour estime que cette restriction peut être justifiée par l’objectif d’éviter le risque d’impunité des personnes ayant commis une infraction. Elle recherche si la mesure est nécessaire pour atteindre cet objectif et s’il existe des mesures moins restrictives pour atteindre ce dernier, telle que la remise du ressortissant concerné à son pays d’origine si celui-ci est compétent pour le poursuivre. A cet égard, la Cour constate que les autorités italiennes ont été informées préalablement à l’extradition sans qu’elles n’aient émis de mandat d’arrêt européen. Partant, la Cour conclut que le droit de l’Union ne s’oppose pas à l’extradition, dans le cadre de l’accord UE-EU, d’un citoyen de l’Union par un Etat membre autre que son Etat d’origine dès lors que ce dernier a été préalablement mis en mesure de réclamer son ressortissant dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen et qu’il n’a adopté aucune mesure en ce sens. (MS)