Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Verwaltungsgerichtshof (Autriche), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 16 avril dernier, l’article 11 de la directive 2011/92/UE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (Gruber, aff. C-570/13). Dans le litige au principal, l’administration avait autorisé la construction et l’exploitation d’un centre commercial sur un terrain avoisinant le bien foncier de la requérante. Cette dernière a formé un recours devant les juridictions autrichiennes aux fins de faire annuler la décision administrative, en alléguant, notamment, que l’autorisation aurait dû être conditionnée à la réalisation d’une évaluation des incidences sur l’environnement (« EIE »). La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si la décision constatant l’absence de nécessité d’effectuer un EIE a un effet obligatoire à l’égard des voisins, qui sont exclus du droit de recours contre la décision administrative, et, le cas échéant, si l’absence d’effet obligatoire devait être formellement constatée. La Cour rappelle, tout d’abord, que les membres du public concerné, c’est-à-dire ayant un intérêt à agir suffisant ou faisant valoir une atteinte à un droit, doivent pouvoir former un recours contre les décisions, actes et omissions relevant des dispositions de la directive. A cet égard, elle relève que les Etats membres disposent d’une large marge d’appréciation pour déterminer ce qui constitue un intérêt suffisant pour agir ou une atteinte à un droit, dans le respect, toutefois, de l’objectif visant à assurer un large accès à la justice au public concerné. Elle considère, dès lors, que les dispositions de la directive relatives aux droits de recours des membres du public ne sauraient être interprétées de manière restrictive. Ainsi, la Cour estime qu’en l’espèce, la requérante est une voisine susceptible de faire partie du public concerné. Ce faisant, elle note que ces voisins, alors même que l’exploitation d’une installation peut porter atteinte à leurs droits ou les exposer à des nuisances ou des dangers, ne disposent d’un droit de recours qu’à l’encontre de l’autorisation de construction. Or, n’étant pas parties à la procédure de constatation de la nécessité de procéder à une EIE, ils ne peuvent contester cette décision dans le cadre d’un recours contre la décision administrative d’autorisation. Ainsi, une telle exclusion restreint la portée de l’article 11 de la directive et est, dès lors, incompatible avec la directive. Partant, elle conclut à la non-conformité d’une disposition de droit national qui prévoit qu’une décision constatant l’absence de nécessité de procéder à une EIE a un effet obligatoire à l’égard des voisins exclus du droit de recours, à condition qu’ils aient un intérêt suffisant pour agir ou ont subi une atteinte à un droit. Il incombe au juge national de vérifier que cette condition est remplie et, le cas échéant, de constater l’absence d’effet obligatoire d’une telle décision. (DH)