Saisie de 3 requêtes dirigées contre la Grèce, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 21 juillet dernier, l’article 1er du Protocole n°1 à la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 14 de la Convention relatifs, respectivement, à la protection de la propriété et à l’interdiction de la discrimination (Mamatas e.a. c. Grèce, requêtes n°63066/14, 64297/14 et 66106/14). Les requérants, ressortissants grecs, sont porteurs d’obligations de l’Etat grec, en tant que personnes physiques. En 2011, pour faire face à la crise économique, la Grèce a imposé à la totalité des particuliers créanciers de participer à la diminution de la dette publique. Après le vote d’une loi modifiant les conditions qui régissaient les obligations par le jeu de clauses d’action collectives et malgré le refus des requérants, leurs titres ont été annulés et remplacés par des nouveaux, entrainant une baisse de 53,5% de leur montant. Devant la Cour, ils alléguaient que l’échange de leurs titres constituait une expropriation de fait ayant entrainé une privation de leur propriété ou, à titre subsidiaire, une ingérence dans le droit au respect de leurs biens. Ils se plaignaient, également, d’avoir subi une discrimination par rapport, notamment, aux grands créanciers porteurs d’obligations d’une valeur de plusieurs milliards d’euros, du fait de l’inclusion des personnes physiques dans un processus d’échange initialement conçu pour les personnes morales porteurs d’obligations. S’agissant de l’article 1er du Protocole n°1 à la Convention, la Cour relève que cette participation forcée au processus de la décote constitue bien une ingérence dans le droit des requérants au respect de leurs biens, laquelle était, cependant, prévue par la loi. Elle précise, par ailleurs, que ces mesures poursuivaient un but d’utilité publique, à savoir le maintien de la stabilité économique et la restructuration de la dette à un moment où la Grèce traversait une grave crise économique, et que les mesures prises par cet Etat n’étaient pas disproportionnées à ce but légitime. En effet, selon la Cour, les Etats disposent d’une importante marge d’appréciation dans ce domaine. Elle considère, qu’en l’espèce, la Grèce n’a pas rompu le juste équilibre entre l’intérêt général et la protection des droits de propriété des requérants en leur faisant subir une charge particulièrement excessive. A la suite de l’examen de ces critères, la Cour conclut à l’absence de violation de l’article 1erdu Protocole n°1 à la Convention. S’agissant de l’article 14 de la Convention, la Cour juge que la procédure d’échange n’était pas discriminatoire en raison, notamment, de la difficulté de localiser les porteurs d’obligations de ce marché volatil, de la difficulté d’établir des critères précis de différenciation entre porteurs, du risque de mettre en péril l’ensemble de l’opération avec des conséquences désastreuses pour l’économie et de la nécessité d’agir rapidement pour la restructuration de la dette. Partant, la Cour conclut à l’absence de violation de l’article 14 de la Convention. (MT)