Saisi d’un renvoi préjudiciel par le Bundesgerichtshof (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 13 mai dernier, l’article 4 §1 de la directive 2001/29/CE sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (Dimensione Direct Sales et Labianca, aff. C-516/13). Le litige au principal opposait une société de droit italien détentrice de droits d’auteur exclusifs pour l’exploitation de mobiliers de valeur en Allemagne à une autre société de droit italien, auteur d’une campagne de publicité ciblée vers l’Allemagne concernant l’offre de vente de reproductions desdits meubles protégés. La première société alléguait une violation de son droit exclusif de distribution en Allemagne par la deuxième société. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 4 §1 de la directive doit être interprété en ce sens qu’il permet à un titulaire du droit exclusif de distribution d’une œuvre protégée de s’opposer à une offre de vente ou à une publicité concernant l’original ou une copie de cette œuvre, quand bien même il ne serait pas établi que cette offre ou cette publicité a donné lieu à l’acquisition de l’objet protégé par un acheteur de l’Union. La Cour rappelle, tout d’abord, que conformément à l’article 4 §1 de la directive, un droit exclusif est conféré aux auteurs d’autoriser ou d’interdire toute forme de distribution au public, par la vente ou autrement, de l’original de leurs œuvres ou de copies de celles-ci. Tenant compte du droit international, la Cour rappelle, ensuite, que la distribution au public se caractérise par une série d’opérations allant de la conclusion d’un contrat de vente à l’exécution de celui-ci par la livraison à un membre du public et considère qu’il n’est pas exclu que des opérations ou des actes précédant la conclusion du contrat de vente puissent, également, relever de la notion de « distribution » et être réservés, à titre exclusif, aux titulaires du droit d’auteur. Dès lors, il peut y avoir atteinte au droit exclusif de distribution lorsqu’un commerçant, non titulaire du droit d’auteur, met en vente des œuvres protégées ou des copies de celles-ci et adresse une publicité, par son site Internet, par publipostage ou dans la presse, aux consommateurs situés sur le territoire de l’Etat membre dans lequel ces œuvres sont protégées afin d’inciter ceux-ci à en faire l’acquisition. Pour la Cour, il est sans incidence, pour qu’une atteinte au droit de distribution soit constatée, que cette publicité ne soit pas suivie du transfert de propriété de l’œuvre protégée ou de sa copie à l’acquéreur. Par conséquent, la Cour conclut que l’article 4 §1 de la directive doit être interprété en ce sens qu’il permet à un titulaire de droit exclusif de distribution d’une œuvre protégée de s’opposer à une offre de vente ou à une publicité ciblée concernant l’original ou une copie de cette œuvre, quand bien même il ne serait pas établi que cette publicité a donné lieu à l’acquisition de l’objet protégé par un acheteur de l’Union, pour autant que ladite publicité incite les consommateurs de l’Etat membre dans lequel ladite œuvre est protégée par le droit d’auteur à en faire l’acquisition. (AB)