Saisie d’un renvoi préjudiciel par l’Oberster Gerichtshof (Autriche), la Cour de justice de l’Union européenne a, notamment, interprété, le 27 mars dernier, l’article 8 §3 de la directive 2001/29/CE sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (UPC Telekabel Wien, aff. C-314/12). Dans le litige au principal, 2 sociétés de production cinématographique ont constaté qu’un site Internet proposait sans leur accord de télécharger ou de regarder en « streaming » certains des films qu’elles avaient produits. Une ordonnance interdisant à un fournisseur d’accès à Internet de fournir à ses clients l’accès au site Internet litigieux a été rendue, puis contestée par ledit fournisseur d’accès. La juridiction de renvoi a, notamment, interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 8 §3 de la directive doit être interprété en ce sens qu’une personne qui met à la disposition du public sur un site Internet des objets protégés sans l’accord du titulaire de droits, au sens de l’article 3 §2 de cette directive, utilise les services du fournisseur d’accès à Internet des personnes qui consultent ces objets, lequel serait à considérer comme un intermédiaire au sens de l’article 8 §3 de la directive. Tout d’abord, la Cour note que l’article 8 §3 de la directive prévoit la possibilité pour les titulaires de droits de demander qu’une ordonnance sur requête soit rendue à l’encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à l’un de leurs droits. Elle souligne que le terme d’ « intermédiaire » vise toute personne qui transmet dans un réseau une contrefaçon commise par un tiers d’une œuvre protégée ou d’un autre objet protégé. La Cour considère, dès lors, qu’un fournisseur d’accès à Internet qui permet à ses clients d’accéder à des objets protégés mis à la disposition du public sur Internet par un tiers est un intermédiaire dont les services sont utilisés pour porter atteinte à un droit d’auteur au sens de l’article 8 §3 de la directive. Il n’est pas déterminant que les personnes qui composent le public aient ou non effectivement eu accès à l’œuvre. Enfin, la Cour conclut que les droits fondamentaux reconnus par le droit de l’Union ne s’opposent pas à ce qu’il soit fait interdiction, au moyen d’une injonction prononcée par un juge, à un fournisseur d’accès à Internet d’accorder à ses clients l’accès à un site Internet mettant en ligne des objets protégés sans l’accord des titulaires de droits, lorsque cette injonction ne précise pas quelles mesures il doit prendre. Le fournisseur d’accès peut échapper aux astreintes visant à réprimer la violation de l’injonction en prouvant à la juridiction nationale qu’il a pris toutes les mesures raisonnables, à condition qu’elles ne privent pas inutilement les utilisateurs d’Internet de la possibilité d’accéder de façon licite aux informations disponibles et que ces mesures aient pour effet d’empêcher les consultations non autorisées des objets protégés. (MG)