Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Bayerisches Verwaltungsgericht München (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 26 février dernier, l’article 9 §2, sous b), c) et e), de la directive 2004/83/CE concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (Shepherd, aff. C-472/13). Dans l’affaire au principal, un ressortissant américain a demandé l’asile en Allemagne après avoir déserté l’armée américaine dans laquelle il était chargé de l’entretien des hélicoptères, alors que son unité devait se rendre de nouveau en Irak. Il alléguait que le risque de poursuites pénales découlant de sa désertion constituait une persécution au sens de la directive. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a, notamment, interrogé la Cour sur la question de savoir si la protection accordée par la directive au déserteur en cas de risque de commission de crimes de guerre ne concerne que les personnes impliquées directement dans des opérations de combat. Par ailleurs, elle soulevait les questions du régime de la preuve d’une violation du droit international et de l’articulation entre une demande d’asile et la procédure normale d’objection de conscience. La Cour rappelle, tout d’abord, que les dispositions de la directive doivent être interprétées à la lumière de la Convention de Genève relative aux statuts des réfugiés et dans le respect des droits reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle analyse, ensuite, si les sanctions encourues sont qualifiables d’ « actes de persécution ». Elle constate que la protection offerte aux personnes refusant d’effectuer leur service militaire ne présente aucun caractère restrictif quant aux personnes concernées. En outre, la Cour précise que la directive impose de prendre en compte objectivement le contexte général dans lequel est exercé le service, mais exige comme condition du bénéfice de la protection que l’exercice des fonctions puisse, plausiblement, conduire à commettre des crimes de guerre de manière suffisamment directe. A cet égard, la Cour indique que le fait qu’une intervention militaire ait été engagée en vertu d’un mandat du Conseil de sécurité des Nations-Unies ou sur le fondement d’un consensus de la communauté internationale et, d’autre part, que l’Etat ou les Etats menant les opérations répriment les crimes de guerre doivent être pris en considération. Enfin, concernant l’articulation entre la demande d’asile et la procédure d’objection de conscience, la Cour souligne que l’abstention de recourir à une procédure visant à l’obtention du statut d’objecteur de conscience exclut toute protection au titre de la disposition examinée. (JL)