Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Landgericht Krefeld (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 13 mars dernier, l’article 5, point 1, du règlement 44/2001/CE concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (Brogsitter, aff. C‑548/12). Le litige au principal opposait le requérant, commerçant de montres de luxe domicilié en Allemagne, à une société de fabrication de montres établie en France au moment de la signature du contrat les liant et depuis 2010 en Suisse, au sujet du préjudice qu’il aurait subi du fait d’agissements de cette dernière qu’il considère comme étant constitutifs de concurrence déloyale. La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si des actions en responsabilité civile, telles que celles en cause au principal, de nature délictuelle en droit national, doivent néanmoins être considérées comme relevant de la « matière contractuelle », au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement, compte tenu du contrat qui lie les parties au principal. La Cour rappelle, en premier lieu, que la notion de « matière délictuelle ou quasi délictuelle » au sens du règlement se déduit de manière négative, c’est-à-dire lorsque la demande ne se rattache pas à la « matière contractuelle ». La Cour considère, en second lieu, qu’en présence d’un contrat liant les parties, la seule circonstance que l’une des parties contractantes intente une action en responsabilité civile contre l’autre ne suffit pas pour considérer que cette action relève de la « matière contractuelle » au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement. Il n’en va ainsi que si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles. La Cour énonce que tel est a priori le cas si l’interprétation du contrat qui lie le défendeur au demandeur apparaît indispensable pour établir le caractère licite ou illicite du comportement reproché au premier par le second. Partant, la Cour conclut qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si les actions intentées par le requérant au principal ont pour objet une demande de réparation dont la cause peut être raisonnablement regardée comme une violation des droits et des obligations du contrat qui lie les parties au principal, ce qui en rendrait indispensable la prise en compte pour trancher le recours. (CK)