Saisie d’une requête dirigée contre le Portugal, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 3 septembre dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Sérvulo & associados e.a. c. Portugal, requête n°27013/10). Les requérants, ressortissants portugais, sont avocats au sein d’un cabinet. Ce dernier a fait l’objet d’une perquisition et de saisies de documents et de données informatiques dans le cadre d’une enquête portant sur des soupçons de corruption, de prise illégale d’intérêt, de blanchiment d’argent, alors que ses membres assistaient le ministère de la défense portugais dans la négociation d’un contrat. Le juge d’instruction a délivré des mandats permettant la saisie de données informatiques sur la base d’une liste de 35 mots clés. Après que les requérants aient formé opposition, le juge saisi a rejeté leur demande et a ordonné la transmission des documents au juge d’instruction, lequel a fait supprimer tous les documents présentant des informations à caractère personnel ou couverts par le secret professionnel. Les requérants alléguaient une violation de l’article 8 de la Convention dans la mesure où le nombre de mots clés avait permis au juge d’instruction, unique juge du pays chargé des affaires criminelles les plus complexes, d’avoir accès à des documents couverts par le secret professionnel et pouvant avoir un intérêt dans d’autres affaires qu’il instruisait. Saisie dans ce contexte, la Cour rappelle qu’une ingérence dans le droit à la vie privée et familiale enfreint l’article 8 de la Convention exceptée lorsqu’elle est prévue par la loi, qu’elle poursuit un but légitime et qu’elle est nécessaire dans une société démocratique. Les 2 premières conditions étant réunies, la Cour examine le caractère nécessaire de la procédure. Elle note, à cet égard, que le contrôle de la légalité de la perquisition et des saisies par le juge d’instruction avait spécialement pour but de protéger le secret professionnel des avocats. En outre, ce dernier ne disposait d’aucun pouvoir pour engager une enquête. De plus, la Cour constate que la procédure d’opposition, conformément au Statut de l’Ordre des avocats, a constitué un recours adéquat et effectif complémentaire au contrôle exercé par le juge d’instruction pour compenser l’étendue du mandat de perquisition. Partant, la Cour conclut à la non-violation de l’article 8 de la Convention. (JL)