Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Raad van State (Pays-Bas), la Cour de justice de l’Union européenne a apprécié, le 15 février dernier, la validité de l’article 8 §3, premier alinéa, sous e), de la directive 2013/33/UE établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, lequel est relatif au placement en rétention des demandeurs d’asile motivé par la protection de la sécurité nationale ou de l’ordre public (J.N., aff. C-601/15 PPU). Dans l’affaire au principal, un ressortissant tunisien, dont toutes les demandes d’asile ont été rejetées et qui a été condamné à de multiples reprises, a demandé une nouvelle fois l’asile et a été placé en rétention en tant que demandeur d’asile. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 8 §3, premier alinéa, sous e), de la directive est conforme à l’article 6 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne relatif au droit à la liberté et à la sûreté. La Cour rappelle, tout d’abord, que, conformément à l’article 52 §1 de la Charte, toute limitation de l’exercice des droits et des libertés reconnus par celle-ci doit être prévue par la loi et respecter leur contenu essentiel. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées à l’exercice de ces droits et de ces libertés que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui. Elle constate que la disposition en cause ne saurait fonder des mesures de rétention sans que les autorités nationales compétentes aient préalablement vérifié, au cas par cas, si le danger que les personnes concernées font courir à la sécurité nationale ou à l’ordre public correspond au moins à la gravité de l’ingérence que constitueraient de telles mesures dans le droit à la liberté de ces personnes et, partant, considère ladite disposition proportionnée au but visé. Ensuite, la Cour tient compte de l’article 5 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme en vue de l’interprétation de l’article 6 de la Charte. Rappelant la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, elle constate que la portée de la disposition est strictement encadrée et satisfait aux exigences de l’article 5 §1 de la Convention et, notamment, que la mise en œuvre de la privation de liberté soit exempte de toute tromperie de la part des autorités. Partant, la Cour conclut à la validité de l’article 8 §3, premier alinéa, sous e), de la directive au regard de la Charte. (JL)