Saisie d’un renvoi préjudiciel par l’Oberlandesgericht Koblenz (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 21 novembre dernier, les articles 107 et 108 TFUE relatifs aux aides d’Etat (Deutsche Lufthansa, aff. C-284/12). Le litige au principal opposait la compagnie aérienne Lufthansa à la société exploitant l’aéroport de Francfort-Hahn, détenue entièrement par des capitaux publics, au sujet, notamment, de la réduction des redevances aéroportuaires dont la compagnie aérienne Ryanair aurait bénéficié. Considérant que les pratiques commerciales en cause constituaient une aide d’Etat non notifiée à la Commission européenne, la société Lufthansa a saisi la juridiction de première instance d’une demande de cessation et de récupération des sommes versées. La Commission ayant ultérieurement ouvert la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108 §2 TFUE pour ces mesures, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si, lorsque cette procédure a été ouverte à l’égard d’une mesure étatique non notifiée en cours d’exécution et qu’elle est saisie d’une demande tendant à la cessation de celle-ci, elle est tenue de tirer les conséquences d’une éventuelle violation de l’obligation de suspension de l’exécution de cette mesure. La Cour rappelle, tout d’abord, que, dans la mise en œuvre du système de contrôle préventif des projets d’aides nouvelles, les juridictions nationales veillent à la sauvegarde, jusqu’à la décision finale de la Commission, des droits des justiciables face à une méconnaissance éventuelle, par les autorités étatiques, de l’interdiction de l’exécution du projet d’aide prévue à l’article 108 §3 TFUE. Elle considère, ensuite, que, au cas où les juridictions nationales pourraient estimer qu’une mesure ne constitue pas une aide et, partant, ne pas suspendre son exécution, alors que la Commission vient de constater, dans sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, que cette mesure est susceptible de présenter des éléments constitutifs d’une aide, l’effet utile de l’article 108 §3 TFUE serait mis en échec. Par conséquent, la Cour considère que, lorsque la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen à l’égard d’une mesure en cours d’exécution, les juridictions nationales sont tenues d’adopter toutes les mesures nécessaires en vue de tirer les conséquences d’une éventuelle violation de l’obligation de suspension de l’exécution de cette mesure, notamment l’adoption, le cas échéant, d’une décision de récupération des montants déjà versés. (SB)