Saisie d’un pourvoi introduit par la Commission européenne et l’Espagne contre un arrêt du Tribunal de l’Union européenne (aff. jointes T-211/04 et T-215/04) annulant la décision 2005/261/CE de la Commission relative au régime d’aides que le Royaume-Uni envisage de mettre à exécution concernant la réforme de l’impôt sur les sociétés par le gouvernement de Gibraltar, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé, le 15 novembre dernier, que le Tribunal avait commis une erreur de droit en considérant que le projet de réforme fiscale ne confère pas d’avantages sélectifs aux sociétés offshore (Commission et Espagne / Royaume-Uni etGovernment of Gibraltar, aff. jointes C-106/09 et C-107/09). La Commission avait décidé que les propositions notifiées constituaient un régime d’aides d’Etat incompatible avec le marché intérieur, dans la mesure où certains aspects de la réforme fiscale étaient sélectifs sur le plan matériel. La Cour affirme que la qualification d’un régime fiscal de sélectif n’est pas subordonnée au fait que les entreprises bénéficiant d’un avantage sélectif sont soumises aux mêmes charges fiscales que les autres entreprises mais profitent de règles dérogatoires, de sorte que l’avantage sélectif peut être identifié comme étant la différence entre la charge fiscale normale et celle supportée par les entreprises bénéficiant d’un avantage sélectif. En revanche, elle précise que le caractère sélectif d’un régime fiscal existe lorsque, comme en l’espèce, les critères d’imposition retenus par un système fiscal sont de nature à caractériser les entreprises bénéficiaires en vertu des propriétés qui leur sont spécifiques en tant que catégorie d’entreprises privilégiées. En l’espèce, la Cour constate que le régime fiscal en cause est, notamment, caractérisé par la combinaison de l’impôt sur le nombre de salariés et de l’impôt sur l’occupation de locaux professionnels en tant que seules bases d’imposition aboutissant à une imposition qui est fonction du nombre de salariés et de la taille des locaux professionnels occupés. Or, en raison de l’absence d’autres bases d’imposition, la combinaison de ces deux bases d’imposition exclut d’emblée, de toute imposition, les sociétés offshore du fait qu’elles n’ont pas de salariés et n’occupent pas non plus de locaux professionnels. Par conséquent, la Cour conclut que la circonstance que les sociétés offshore échappent à l’imposition, précisément en raison des caractéristiques propres et spécifiques à cette catégorie de sociétés, permet de considérer qu’elles bénéficient d’avantages sélectifs. La Cour annule donc l’arrêt du Tribunal et confirme la décision de la Commission. (JM / AGH)