Saisie de deux pourvois introduits par les sociétés Bouygues S.A. et Bouygues Télécom S.A. demandant l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 21 mai 2010 (France e.a. / Commission, aff. jointes T-425/04 T-444/04, T-450/04 et T-456/04), la Cour de justice de l’Union européenne a infirmé, le 19 mars dernier, l’analyse du Tribunal relative à l’aide d’Etat octroyée par la France à France Télécom en 2002 (Bouygues S.A., Bouygues Télécom S.A. / Commission, aff. jointes C-399/10 et C-401/10). Dans un contexte de difficultés financières importantes de France Télécom, la France a déclaré, à plusieurs reprises, son soutien l’entreprise et a proposé l’octroi d’une avance d’actionnaire, laquelle n’a cependant jamais été exécutée. La Commission européenne a qualifié ces interventions étatiques d’aides d’Etat. Le Tribunal a annulé cette décision en considérant que si ces déclarations avaient conféré un avantage à l’entreprise, ce dernier n’avait pas entraîné une diminution correspondante du budget étatique. Saisie par les sociétés Bouygues, la Cour considère que le Tribunal a commis des erreurs de droit, tant dans son contrôle de l’identification par la Commission de l’intervention étatique conférant une aide d’Etat que dans l’examen des liens entre l’avantage identifié et l’engagement de ressources d’Etat constaté par la Commission. En effet, le Tribunal a requis un lien étroit de connexité entre l’avantage et l’engagement de ressources d’Etat pour constater l’existence d’une aide d’Etat. Or, selon la Cour, pour caractériser l’existence d’une aide d’Etat, il n’est pas nécessaire qu’une diminution ou un risque économique pesant sur le budget étatique corresponde ou soit équivalent à l’avantage accordé au bénéficiaire. De même, il n’est pas nécessaire que cet avantage ait pour contrepartie une telle diminution ou un tel risque, ni qu’il soit de même nature que l’engagement de ressources d’Etat dont il découle. Partant, la Cour annule l’arrêt attaqué. Statuant au fond, elle estime que c’est à bon droit que la Commission a considéré que l’avance d’actionnaire, annoncée et notifiée par la France, avait conféré un avantage à l’entreprise en lui permettant d’augmenter ses moyens de financement et de rassurer le marché, dès lors que cette avance d’actionnaire avait déjà été mise à disposition de l’entreprise qui aurait pu en obtenir immédiatement le versement en la signant. (SC)