Saisie d’un recours dirigé contre la Belgique, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 18 juillet dernier, les articles 3 et 5 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatifs, respectivement, à l’interdiction de la torture ou des traitements inhumains et dégradants et au droit à la liberté et à la sûreté (Rooman c. Belgique, requête n°18052/11). Le requérant, ressortissant belge et allemand, a été condamné pour des faits de vol et de violence sexuelle avant d’être interné. Après le rejet par la commission de défense sociale des demandes de libération qu’il avait formées afin de trouver une institution pouvant le prendre en charge et assurer son suivi thérapeutique en allemand, seule langue comprise et parlée par le requérant, l’affaire a été renvoyée auprès de la commission supérieure de défense sociale (« CSDS »). Celle-ci a demandé à ce que toutes les mesures utiles soient prises pour que les soins que nécessite le requérant lui soient prodigués. Parallèlement, ce dernier n’a bénéficié de soins psychiatriques et psychologiques en allemand que pendant une période limitée. Il alléguait, dès lors, que les conditions de sa détention emportait violation des articles 5 §1 et 3 de la Convention. S’agissant de l’allégation de traitements inhumains et dégradants, la Cour estime que, malgré l’absence de personnel médical de langue allemande et la difficile prise en charge thérapeutique des problèmes de santé mentale du requérant, l’Etat ne pouvait pas se voir dispensé de ses obligations envers ce dernier. A cet égard, la Cour souligne que le requérant, interné depuis 13 ans, sans encadrement médical approprié et sans espoir réaliste de changement, a été soumis à une situation de détresse d’une intensité excédant le niveau de souffrance inhérent à la détention. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 3 de la Convention. S’agissant du caractère irrégulier de la détention, la Cour admet que les autorités nationales n’ont pas assuré une prise en charge adéquate de l’interné en raison du manque de personnel soignant parlant allemand. Elle relève, néanmoins, que le requérant est détenu dans un établissement adapté tant à son état de santé mentale qu’à sa dangerosité et elle rappelle sa jurisprudence selon laquelle le caractère adéquat du traitement ou du régime ne relève pas de l’article 5 §1 de la Convention. En l’espèce, la Cour constate qu’il y a toujours eu un lien entre le motif de l’internement et la maladie mentale du requérant. Partant, la Cour conclut à la non-violation de l’article 5 §1 de la Convention. (CB)