Un juge national doit laisser inappliquée, sans crainte de poursuites disciplinaires, la jurisprudence d’une Cour constitutionnelle qui méconnaîtrait le droit au recours effectif garanti par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (26 septembre)
Arrêt Energotehnica, aff. C-792/22
Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Cour d’appel de Brașov (Roumanie), la Cour de justice de l’Union européenne a rappelé les implications des principes de primauté et d’effectivité du droit de l’Union à l’égard de la Charte des droits fondamentaux et de la directive 89/391/CEE concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail. En l’espèce, la Cour constitutionnelle roumaine interprétait son droit national en ce que la décision d’une juridiction administrative refusant de qualifier un accident du travail devait être revêtue de l’autorité de la chose jugée, empêchant au passage la juridiction pénale de reconsidérer l’affaire. Dans un 1er temps, la Cour relève que la directive vise à protéger la sécurité des travailleurs et laisse aux Etats membres le soin de déterminer les voies procédurales appropriées pour engager la responsabilité de l’employeur, à condition de respecter le droit de l’Union. Ainsi, une telle interprétation, serait, telle que celle en l’espèce, de nature à priver d’effet utile les obligations de la directive et méconnaîtrait le droit au recours effectif garanti par la Charte. Dans un 2ème temps, elle rappelle que le principe de primauté implique que le juge interne puisse laisser inappliquée d’office la jurisprudence de sa Cour constitutionnelle incompatible avec le droit de l’Union, sans crainte de poursuites disciplinaires. (LF)