Dès lors qu’elle ne répond pas à l’exigence de prévisibilité de la loi, la levée de l’immunité parlementaire d’une députée par le biais d’une modification constitutionnelle constitue une violation de l’article 10 de la Convention (4 mai)
Arrêt Kerestecioglu c. Turquie, requête n°68136/16
La Cour EDH constate que la modification constitutionnelle en cause avait pour but de limiter le discours politique des parlementaires touchés par celle-ci. La levée de l’immunité parlementaire par le biais de la modification constitutionnelle constitue donc en soi une ingérence dans l’exercice du droit de la requérante protégé par l’article 10 de la Convention. La Cour EDH estime qu’il s’agissait en l’espèce d’une modification ad hoc, ponctuelle et ad hominem sans précédent dans la tradition constitutionnelle nationale. Il ressort d’ailleurs de la motivation de la modification constitutionnelle que les déclarations des députés étaient expressément visées. La Cour EDH considère ainsi que l’ingérence dans l’exercice de la liberté d’expression de la requérante n’était pas prévue par la loi en ce qu’elle ne répondait pas à l’exigence de prévisibilité. Elle précise qu’un député doit pouvoir légitimement s’attendre, lorsqu’il défend une opinion politique, à bénéficier du cadre juridique constitutionnel en place offrant une immunité. Partant, la Cour EDH conclut à la violation de l’article 10 de la Convention. (VR)