Le prononcé d’une condamnation pénale, insuffisamment motivé, pour dénonciation calomnieuse à l’encontre d’un avocat, auteur d’une lettre ouverte, constitue une ingérence disproportionnée dans l’exercice du droit à la liberté d’expression (26 mars)
Arrêt Tête c. France, requête n°59636/16
La Cour EDH, rappelant que le fait de dénoncer un comportement prétendument illicite devant une autorité est susceptible de relever de la liberté d’expression, considère que la condamnation du requérant pour dénonciation calomnieuse constitue une ingérence dans l’exercice de cette liberté dès lors que ladite condamnation reposait sur la substance des propos contenus dans sa lettre. Elle relève que ladite ingérence était prévue par la loi et qu’elle poursuivait un but légitime, à savoir la protection de la réputation ou des droits d’autrui. S’agissant de la nécessité d’une telle ingérence dans une société démocratique, elle constate que les juridictions françaises n’ont pas procédé à une mise en balance du droit à la liberté d’expression du requérant et du droit au respect de la vie privée de la personne dont la réputation était en cause, la nécessité de l’ingérence dans le droit à la liberté d’expression du requérant n’ayant donc pas été dûment examinée. En outre, le requérant s’exprimait sur un sujet d’intérêt général et dans le cadre d’une démarche politique et militante et usait de la forme interrogative plutôt qu’affirmative, circonstances qui n’ont pas été prises en compte par les juridictions françaises. Partant, la Cour EDH conclut à la violation de l’article 10 de la Convention. (PLB)