Saisie d’une requête dirigée contre la Roumanie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 10 juillet dernier, l’article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif au droit à un procès équitable (Ilie Şerban c. Roumanie, requête n°17984/04). Le requérant, qui exerçait la profession de juriste d’entreprise depuis plus de 10 ans, a demandé son inscription au Barreau sans examen, invoquant une loi nationale sur l’organisation de la profession d’avocat. Sa demande a été rejetée par les autorités compétentes une première fois, puis une deuxième fois à la suite d’un examen écrit sur l’organisation et l’exercice de la profession d’avocat. La juridiction suprême roumaine saisie a considéré que la décision de refus imposée au requérant était légale en ce que, d’une part, les dispositions nationales n’ouvraient à l’intéressé qu’une possibilité et non un droit à être inscrit au Barreau sans examen et, d’autre part, les autorités compétentes, qui avaient constaté l’échec du requérant à l’examen, avaient légalement justifié leur décision. Le requérant considère que le refus qui lui a été opposé constitue une atteinte au principe de sécurité juridique, protégé au titre du droit à un procès équitable par l’article 6 §1 de la Convention, au motif que l’arrêt prononcé contre lui par la juridiction suprême va à l’encontre de sa jurisprudence constante. La Cour constate, tout d’abord, que la jurisprudence constante de la Cour suprême confère aux juristes ayant exercé plus de 10 ans le droit d’accéder au Barreau sans examen d’entrée. Elle observe, ensuite, que la solution adoptée en l’espèce est contraire à cette jurisprudence constante, alors même qu’elle ne peut être qualifiée de revirement de jurisprudence de nature à expliquer ce changement de position et ce, d’autant plus, que la Cour est ultérieurement revenue à sa jurisprudence constante. Dès lors, l’arrêt opposé au requérant apparaissant comme singulier et arbitraire, la Cour conclut à la violation de l’article 6 §1 de la Convention.