Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 18 avril dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (M.K. c. France, requête n°19522/09). Le requérant, ressortissant français, a fait l’objet de plusieurs enquêtes et procédures judiciaires pour vol. Au cours de celles-ci, ses empreintes digitales ont été enregistrées au fichier automatisé des empreintes digitales (FAED). Sa culpabilité n’ayant pas été prouvée, le requérant a demandé l’effacement de ses empreintes. A la suite du rejet partiel de sa demande, il a allégué une atteinte à son droit au respect de la vie privée. La Cour rappelle, tout d’abord, que la conservation, dans un fichier des autorités nationales, des empreintes digitales d’un individu constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie privée. Celle-ci peut être considérée comme nécessaire dans une société démocratique si elle répond à un besoin social impérieux et est, notamment, proportionnée au but légitime poursuivi. En l’espèce, la Cour constate que la finalité du FAED a nécessairement pour résultat l’ajout et la conservation du plus grand nombre de noms possible. En effet, le processus de conservation est susceptible d’englober de facto toutes les infractions, y compris les simples contraventions, dans l’hypothèse où cela permettrait d’identifier des auteurs de crimes et de délits. En outre, le régime de conservation n’opère aucune distinction fondée sur l’existence ou non d’une condamnation par un tribunal. La Cour considère, par ailleurs, que l’effacement des données risque de se heurter aux intérêts contradictoires des services d’enquête et ne constitue donc qu’une garantie théorique et illusoire. Par conséquent, elle conclut que le régime de conservation des données en cause ne traduit pas un juste équilibre entre les intérêts publics et privés concurrents en jeu. Partant, elle estime que l’atteinte au droit du requérant au respect de sa vie privée est disproportionnée et qu’il y a violation de l’article 8 de la Convention. (SB)