Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Tribunale di Varese (Italie), la Grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 2 mai dernier, la directive 2006/112/CE relative au système commun de TVA, lue en combinaison avec les articles 4 §3 TUE sur le principe de coopération loyale et 325 TFUE relatif à la protection des intérêts financiers de l’Union européenne (Scialdone, aff. C-574/15). Dans l’affaire au principal, l’administration fiscale italienne a infligé une amende à une société qui a omis de verser, dans le délai imparti par la loi, la TVA résultant de sa déclaration annuelle pour un exercice fiscal. L’administrateur unique de cette société a été poursuivi pénalement dans la mesure où le montant impayé dépassait le seuil d’incrimination de 50 000 euros. Toutefois, celui-ci a bénéficié d’une modification de la législation augmentant le seuil d’incrimination à hauteur de 250 000 euros. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si le droit de l’Union s’oppose à une réglementation nationale prévoyant qu’une omission de payer la TVA, dans le délai légal imparti, résultant d’une déclaration annuelle pour un exercice donné est sanctionnée lorsque le montant impayé dépasse le seuil de 250 000 euros, alors qu’un seuil de 150 000 euros s’applique pour l’infraction d’omission de versement des retenues à la source relatives à l’impôt sur le revenu. La Cour rappelle l’autonomie procédurale et institutionnelle des Etats membres pour sanctionner les violations des règles harmonisées en matière de TVA. Toutefois, elle précise que ceux-ci doivent respecter les principes d’équivalence et d’effectivité qui impliquent que les sanctions prévues soient, d’une part, analogues à celles applicables aux violations du droit national de nature et d’importance similaires et, d’autre part, qu’elles aient un caractère effectif et dissuasif. S’agissant du principe d’effectivité, la Cour relève que si des sanctions pénales peuvent être indispensables pour lutter contre des cas de fraudes graves à la TVA, celles-ci ne sont pas, à montant égal, indispensables pour lutter contre les omissions de verser la TVA déclarée, qui ne constituent pas une fraude au sens du droit de l’Union. Toutefois, elle indique que ces omissions illégales peuvent porter atteinte aux intérêts financiers de l’Union et doivent être sanctionnées de manière effective et dissuasive. A ce titre, elle considère que les sanctions prévues en Italie remplissent ces conditions, eu égard à la marge d’appréciation des Etats membres en la matière. S’agissant du principe d’effectivité, la Cour relève que les omissions de versement des retenues à la source relatives à l’impôt sur le revenu, sanctionnées en vertu du droit national, constituent des infractions qui se distinguent des omissions de versement de la TVA déclarée, tant par leurs éléments constitutifs que par les difficultés à les découvrir. Ainsi, ces 2 infractions n’étant pas de nature et d’importance similaires, le principe d’effectivité ne s’oppose pas à ce que des seuils d’incrimination différents soient prévus. Partant, la Cour conclut que le droit de l’Union ne s’oppose pas à une réglementation telle que celle en cause au principal. (MS)