Saisie d’un renvoi préjudiciel par l’Amtsgericht Stuttgart (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 20 décembre 2017, les articles 20 et 30 de la Convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, dite convention de Lugano II, lesquels sont relatifs au sursis à statuer en cas de litispendance et de connexité (Schlömp, aff. C-467/16). Dans l’affaire au principal, les autorités allemandes ont demandé à une personne résidant en Suisse le remboursement de prestations d’assistance sociale complémentaires perçues par son père qui se trouve dans un hospice en Allemagne. Face au refus de cette personne, les autorités allemandes ont lancé une procédure devant une autorité de conciliation suisse. La conciliation ayant échoué, elles ont saisi le juge suisse d’un recours pour obtenir le remboursement des prestations versées. Toutefois, préalablement à la saisine du juge suisse, la personne concernée a introduit un recours devant le juge allemand afin de faire constater qu’il ne lui incombait pas de rembourser les prestations en cause aux autorités allemandes. A cet égard, la Convention de Lugano II, applicable en l’espèce, prévoit que lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions de différents Etats liés par cette Convention, la juridiction saisie en 2nd sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence du tribunal saisi en 1er soit établie. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si la Convention de Lugano II doit être interprétée en ce sens que, en cas de litispendance, la date à laquelle a été engagée une procédure obligatoire de conciliation devant une autorité de conciliation de droit suisse constitue la date à laquelle une « juridiction » est réputée saisie. La Cour constate qu’en droit suisse, le dépôt d’une requête en conciliation constitue l’introduction d’une instance. Elle relève que la procédure de conciliation suisse est prévue par la loi, soumise au principe du contradictoire et, en principe, obligatoire. En effet, son inobservation entraîne l’irrecevabilité d’une éventuelle demande subséquente en justice. La Cour constate, également, que cette procédure peut aboutir soit à un jugement contraignant, soit à une proposition de jugement pouvant acquérir l’autorité de force jugée en l’absence de contestation, soit encore à la ratification d’une conciliation ou à la délivrance d’une autorisation de porter un recours devant un tribunal. En outre, elle note que les autorités suisses de conciliation sont soumises aux garanties prévues par le code de procédure civil suisse en matière de récusation des juges de paix, qui les composent, et exercent leurs fonctions en toute autonomie. Dès lors, la Cour considère que les autorités de conciliation peuvent être qualifiées de « juridiction » au sens de la Convention de Lugano II. (MS)