Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Juzgado de lo Contencioso-Administrativo n° 1 de Pamplona (Espagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 7 décembre dernier, l’article 12 §3 de la directive 2003/109/CE relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (Wilber López Pastuzano, aff. C-636/16). Dans l’affaire au principal, le requérant, un ressortissant colombien ayant obtenu un permis de longue durée en Espagne, a été condamné à 2 peines d’emprisonnement, respectivement de 12 et 3 mois, et incarcéré. Il a, également, fait l’objet d’une décision du gouvernement espagnol ordonnant son éloignement du territoire espagnol assorti d’une interdiction d’entrée sur le territoire pendant 5 ans et du retrait de son permis de séjour de longue durée. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur le point de savoir si l’article 12 §3 de la directive doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règlementation d’un Etat membre qui, telle qu’interprétée par une partie des juridictions de celui-ci, ne prévoit pas l’application des conditions de protection contre l’éloignement d’un ressortissant d’un Etat tiers résident de longue durée pour l’ensemble des décisions administratives d’éloignement, indépendamment de la nature ou des modalités juridiques de cette mesure. La Cour relève, tout d’abord, que l’objectif principal de la directive est l’intégration des ressortissants des pays tiers qui sont installés durablement dans les Etats membres. A cet égard, la directive leur accorde une protection renforcée contre l’expulsion et prévoit que les Etats membres doivent, avant de prendre une décision d’éloignement à leur encontre, prendre en compte la durée de la résidence sur leur territoire, l’âge de la personne concernée, les conséquences pour eux et pour les membres de leurs familles ainsi que les liens avec le pays de résidence ou l’absence de liens avec le pays d’origine. La Cour constate, ensuite, que ces critères doivent être pris en considération indifféremment du fait qu’une telle mesure ait été prononcée en tant que sanction administrative ou qu’elle soit la conséquence d’une condamnation pénale. Elle rappelle, enfin, que l’adoption d’une mesure d’éloignement ne saurait être ordonnée à l’encontre d’un ressortissant pour le seul motif que celui-ci a été condamné à une peine privative de liberté supérieure à un an. Partant, la Cour juge que l’article 12 §3 de la directive doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règlementation d’un Etat membre qui, telle qu’interprétée par les juridictions nationales, ne prévoit pas l’application de conditions de protection contre l’éloignement d’un ressortissant d’un Etat tiers résident de longue durée pour l’ensemble des décisions administratives d’éloignement. (EH)