Saisie d’une requête dirigée contre l’Italie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 14 décembre dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Orlandi et autres c. Italie, requêtes n°26431/12, 26742/12, 44057/12 et 60088/12 – disponible uniquement en anglais). Les requérants, ressortissants italiens et canadien constituant 6 couples homosexuels, se sont mariés hors du territoire italien et ont demandé l’enregistrement de leurs mariages à leur retour en Italie. Les autorités italiennes ont refusé cet enregistrement, au motif que l’ordre juridique national ne permettait pas le mariage homosexuel. Certains des couples requérants ont, par la suite, bénéficié d’une loi interne et de nouveaux décrets légalisant les unions civiles et homosexuelles, lesquels permettent l’enregistrement de tels mariages. Devant la Cour, les requérants se plaignaient du refus d’enregistrement de leurs mariages contractés à l’étranger et de l’impossibilité, qui leur était opposée, de se marier ou d’obtenir, sous une quelconque autre forme, la reconnaissance légale de leur union familiale en Italie. La Cour rappelle, d’une part, que si les Etats demeurent libres de n’ouvrir le mariage qu’aux couples hétérosexuels, les couples homosexuels ont toutefois besoin d’être reconnus légalement et de voir leur relation protégée. Elle relève, d’autre part, qu’il convient d’examiner la question de savoir si, avant l’adoption des nouveaux textes, un juste équilibre avait été ménagé entre les intérêts concurrents de l’Etat et ceux des couples concernés. La Cour observe que les Etats jouissent d’une marge d’appréciation étendue quant à l’enregistrement, en tant que mariages de droit interne, des unions contractées à l’étranger. Pour autant, elle relève que l’absence de toute reconnaissance de leur relation avait entraîné les couples concernés dans un vide juridique, méconnaissant leur réalité sociale et les laissant face à des obstacles dans leur vie quotidienne, sans qu’aucune raison impérieuse d’intérêt général n’ait été avancée pour justifier cette situation. La Cour conclut que l’Etat n’a pas ménagé un juste équilibre entre les intérêts concurrents et que les couples ont été lésés dans leurs droits. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 8 de la Convention. (MT)