Saisie d’un renvoi préjudiciel par l’Oberlandesgericht Düsseldorf (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 27 septembre dernier, l’article 79 §1 du règlement 6/2002/CE sur les dessins ou modèles communautaires, relatif aux dispositions du règlement 44/2001/CE concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, applicable aux procédures concernant les dessins et les modèles, et l’article 6, point 1, du règlement 44/2001/CE, relatif au traitement des affaires connexes (Nintendo c. BigBen Interactive, aff. C-24/16 et C-25/16). Dans l’affaire au principal, Nintendo accusait Big Ben France et sa filiale allemande, Big Ben Allemagne de violation des droits qu’elle tire des dessins et des modèles communautaires enregistrés dont elle est titulaire et d’utilisation illégale des images des produits correspondant à ces dessins. La juridiction de renvoi s’est déclarée compétente pour traiter les demandes visant Big Ben France et Big Ben Allemagne au motif que les demandes sont connexes, mais doutait de la portée de son jugement au-delà de la frontière allemande. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur les points de savoir si, d’une part, elle peut adopter des ordonnances à l’égard de Big Ben Allemagne ayant une portée qui s’étend à l’ensemble du territoire de l’Union européenne et, d’autre part, l’utilisation par un tiers des images des produits sans le consentement du tiers titulaire afin de commercialiser des produits accessoires de produits spécifiques du titulaire, constitue un acte de reproduction à des fins d’illustration au sens de l’article 20 §1, sous c), du règlement 6/2002/CE. S’agissant de la première question, la Cour rappelle que l’article 79 §1 du règlement 6/2001/CE énonce que les dispositions du règlement 44/2001/CE, notamment l’article 6 point 1, sont applicables aux procédures concernant les dessins ou modèles. Il convient alors de vérifier s’il existe un véritable lien de connexité entre les demandes. La Cour considère qu’en l’espèce, les 2 conditions de l’existence d’une même situation de fait et de droit sont remplies. En ce qui concerne la portée territoriale des ordonnances, la Cour rappelle que celle-ci est déterminée par la compétence territoriale du tribunal des marques communautaires ordonnant cette interdiction ainsi que par l’étendue territoriale du droit exclusif du titulaire de la marque auquel il est porté atteinte. En l’espèce, la portée des droits du titulaire d’un dessin ou d’un modèle communautaire s’étend à l’ensemble du territoire de l’Union. Quant à la compétence d’un tribunal des dessins ou modèles communautaire en matière de contrefaçon, celle-ci s’étend aux faits de contrefaçon sur le territoire de tout Etat membre. Dès lors, la juridiction de renvoi est compétente pour adopter des ordonnances ayant une portée sur l’ensemble du territoire de l’Union. S’agissant de la 2nde question, la Cour considère que l’utilisation par un tiers des images des produits sans le consentement du tiers titulaire afin de commercialiser des produits accessoires de produits spécifiques du titulaire, constitue un acte de reproduction à des fins d’illustration. Un tel acte est autorisé, dans la mesure où il respecte les conditions cumulatives énoncées par l’article 20 §1, sous c), du règlement 6/2001/CE. Selon la Cour, il revient à la juridiction de renvoi de procéder à cette analyse. (EH)