Saisie d’une requête dirigée contre l’Allemagne, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 21 septembre dernier, l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à la liberté d’expression (Springer et RTL Television c. Allemagne, requête n°51405/12 – disponible uniquement en anglais). Les requérants, 2 médias allemands, ont couvert le procès pénal d’une personne accusée de meurtre. Avant la 1ère audience, le Président de la juridiction nationale en charge de l’affaire a informé oralement les journalistes que le visage de l’accusé devait être rendu non-identifiable avant que des images de lui ne puissent être publiées. Quelques jours après l’audience, il a adressé à plusieurs journalistes, dont ceux des entreprises requérantes, une décision indiquant que seuls ceux qui s’étaient inscrits auprès du tribunal et qui s’étaient engagés à rendre le visage de l’accusé non-identifiable avant la publication des images qu’ils prendraient, étaient autorisés à filmer ou à photographier la suite du procès. Les requérants ont contesté cette décision, soulignant que l’accusé avait avoué le meurtre dès le 1er jour du procès. Devant la Cour, ils soutenaient que la décision litigieuse avait emporté violation de leur droit à la liberté d’expression. Saisie dans ce contexte, la Cour observe que la décision litigieuse constitue une ingérence dans l’exercice du droit des requérants à la liberté d’expression et que pareille immixtion enfreint l’article 10 de la Convention sauf si elle est prévue par la loi, qu’elle poursuit un but légitime et qu’elle est nécessaire dans une société démocratique. La Cour observe, tout d’abord, que cette ingérence était prévue par la loi. Elle relève, ensuite, que la décision poursuivait le but légitime de protection des droits de l’accusé pendant son procès. Enfin, tenant, notamment, compte du fait que des informations relatives à l’apparence de l’accusé n’auraient pas apporté de valeur ajoutée au débat sur le procès, que l’accusé avait expressément demandé à être protégé de toute publication permettant de le reconnaître, que ses aveux ne le privaient pas de la protection de la présomption d’innocence et que la décision litigieuse n’imposait pas une restriction particulièrement sévère à l’activité de reportage, la Cour estime que l’ingérence dans le droit des requérants à la liberté d’expression était nécessaire dans une société démocratique. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 10 de la Convention. (MT)