Saisie de requêtes dirigées contre la Belgique dans le cadre de 2 affaires, la Cour européenne des droits de l’homme a, notamment, interprété, le 11 juillet dernier, les articles 8 et 9 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit au respect de la vie privée et familiale et à la liberté de pensée, de conscience et de religion (Belcacemi et Oussar c. Belgique, requête n°37798/13 ; Dakir c. Belgique, requête n°4619/12). Dans la 1re affaire, les requérantes, de confession musulmane, ont pris de leur propre initiative la décision de porter le niqab, voile couvrant le visage à l’exception des yeux, conformément à leurs convictions religieuses. Verbalisées sur la base de règlements de police communaux, à la suite de la promulgation de la loi belge interdisant le port de tout vêtement dissimulant le visage, elles ont formé des recours devant le juge national. Dans la 2nde affaire, la requérante qui a, également, pris la décision de porter le niqab, a introduit un recours contre le règlement communal adopté par 3 communes créant la même interdiction. Saisie dans ce contexte, la Cour examine si cette interdiction est conforme aux articles 8 et 9 de la Convention. Elle estime, tout d’abord, que ladite interdiction est prévue par la loi en ce qu’elle dispose d’une base juridique en droit interne et répond aux critères de précision et de prévisibilité de la loi, comme elle l’a déjà jugé concernant la loi française poursuivant le même objectif (S.A.S c. France, requête n°43835/11). Elle constate, ensuite, que l’interdiction litigeuse poursuit 3 objectifs, à savoir, la sécurité publique, l’égalité entre les femmes et les hommes et une certaine conception du vivre ensemble dans la société et que, par conséquent, elle est justifiée dans son principe. La Cour étudie, enfin, la question de savoir si l’interdiction est nécessaire dans une société démocratique. Elle rappelle, à cet égard, le rôle subsidiaire du mécanisme de contrôle institué par la Convention et la légitimité démocratique des autorités nationales qui se trouvent, en principe, mieux placées pour évaluer les besoins et le contexte locaux. La Cour affirme avoir conscience du risque de contribuer à la consolidation des stéréotypes et à la limitation du champ du pluralisme. Selon elle, il s’agit, pour les autorités nationales, de protéger une modalité d’interaction entre les individus essentielle au fonctionnement d’une société démocratique et cette décision constitue un choix de société. La Cour considère, dès lors, qu’elle se doit de faire preuve de réserve dans l’exercice de son contrôle et juge la restriction en cause nécessaire dans une société démocratique. Partant, la Cour conclut à la non-violation des articles 8 et 9 de la Convention. (JJ)