Saisie de 2 recours dirigés contre la Lituanie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 28 juin dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Jankauskas c. Lituanie, requête n°50446/09 et Lekavičienė c. Lituanie, requête n°48427/09 – disponibles uniquement en anglais). Les requérants, ressortissants lituaniens, étaient respectivement avocat stagiaire et avocat. Le 1er a été radié de la liste des avocats stagiaires sur décision de la Cour d’honneur des avocats pour ne pas avoir communiqué des informations concernant une condamnation antérieure qui auraient été utiles pour l’appréciation de sa réputation et la 2ème a vu sa demande de réadmission au Barreau rejetée, au motif qu’elle ne présentait pas le degré élevé de moralité requis, alors qu’elle avait été antérieurement reconnue coupable de faux et d’escroquerie. Ils alléguaient que leur exclusion de la liste des avocats avait porté atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. Saisie dans ce contexte, la Cour admet que les décisions ont impacté la vie professionnelle des requérants et leur vie privée. A la question de savoir si l’ingérence était justifiée, la Cour, après avoir précisé que les mesures d’exclusion étaient prévues par loi et poursuivaient un but légitime, examine le point de savoir si elles étaient nécessaires dans une société démocratique. A cet égard, la Cour rappelle le rôle de la plus haute importance que remplissent les avocats dans l’administration de la justice et souligne que la confiance du public en la justice dépend de sa confiance dans la capacité de la profession d’avocat d’assurer une représentation effective des clients. Elle précise que ce rôle particulier des avocats leur impose des devoirs et restrictions, et notamment en matière de conduite professionnelle, laquelle doit être discrète, honnête et digne. La Cour souligne, à cet égard, que la Recommandation rec(2000)21 du Comité des Ministres sur la liberté d’exercice de la profession d’avocat souligne que ladite profession doit être exercée de manière à renforcer l’Etat de droit et que les principes qui lui sont applicables impliquent la dignité, l’honneur, l’intégrité ainsi que le respect des confrères et de la bonne administration de la justice. S’agissant du 1er requérant, la Cour affirme que les relations entre les Barreaux et leurs avocats doivent être basées sur le respect mutuel et l’assistance de bonne foi. Or, les fonctions d’autorégulation des Barreaux ne pourraient être effectives si ces derniers n’avaient pas accès à l’ensemble des informations de la part de la personne sollicitant son inscription. S’agissant de la 2ème requérante, la Cour observe qu’avant d’être admise au Barreau, celle-ci a prononcé un serment de respecter la loi et les devoirs inhérents à la profession, lesquels ont été violés par la suite. Partant, la Cour considère que les atteintes au droit à la vie privée des requérants étaient proportionnées dans une société démocratique en vue d’assurer un fonctionnement adéquat du système judiciaire et conclut à la non-violation de l’article 8 de la Convention. (JL)